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L'Internationale

L'Internationale, 1983. Le premier numéro d'un journal paraît, qui reprend le titre de celui publié en 1915 par Rosa Luxemburg - emprisonnée - alors que s'affrontaient les peuples entraînés dans la plus grande des boucheries par le capitalisme, l'impérialisme, et alors que s'étaient ralliés à celle-ci les partis de l'Internationale. En 1919, ceux-ci mettront à mort celle qui avait résisté et qui pour cela avait été emprisonnée. L'internationale 1983 comptera 11 numéros, avant de devoir s'arrêter momentanément : Il témoignera de luttes - et certains qui menèrent ces luttes sont encore aujourd'hui emprisonnés. Il réfléchira à l'évolution du capitalisme - et cette réflexion reste toujours aussi nécessaire. Le blog linter est la chronique d'un journal, c'est par là même la chronique des luttes menées alors, cela pourra être aussi la chronique de luttes menées ... aujourd'hui.

      

       SONJA SUDER EST LIBRE         Procès C. Gauger, S. Suder: Une page pour s'informer 

   PALESTINE - Une carte à ne jamais oublier

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Aux camarades, visiteurs du blog, bienvenue ...
Aux camarades qui viennent de rejoindre le blog, bienvenue. A ceux aussi qui lui rendent visite à l'occasion, bonjour. Le combat n'est jamais un échec, s'informer est déjà un pas vers la conscience. L'ordre et la sécurité ne sont pas le désir de tous, s'aliéner par tous les moyens de la société d'aujourd'hui ne nous intéresse pas. Nous ne cherchons pas à exploiter l'autre. Nous ne tournons pas la page des combats passés, ils sont partie de nous. Et chaque mot que nous lisons, chaque image  que nous voyons, contribue à nous former. Nous ne sommes pas dupes. Nous sommes solidaires. Nous chassons les chasseurs d'enfants. Et nous sommes  le jour face à la nuit sans cesse renouvelée de la violence et de l'oppression. Il n'y a pas d'âge pour la révolte. Et 68 rejoint l'esprit de la Bastille de ce 6 mai où les pavés ont su de nouveau voler. La révolte est une et se rit de toutes les différences.

Pour tous ceux qui viennent sur ce blog, qui font "la route des insoumis" que décrit Nathalie, qui sont et seront les révolutionnaires de demain dont parle Jean-Marc, qui se reconnaissent ce droit à l'insurrection que revendique Georges. Pour chacun, ce collage de Joëlle, mieux qu'un bras d'honneur, à tous ceux qui sont ce que nous refusons.

La queue de la baleine, Nathalie, nous ne la lâcherons pas!

Archives

Joëlle Aubron

Sur ce collage, un poème. linter
C'est l'automne, et ce n'est pas l'automne,
Ces femmes qui marchent
Des combattantes?
Des femmes qui marchent?
Vie de tous les jours ou vie d'exception?
Guerre d'Espagne,
Journées d'après occupation?
Journées d'après l'occupation?
La vie est simple
comme l'est souvent le combat

Entre l'or du feuillage
et le noir et blanc de la vie
Cette image sensible

Georges lors d'une audience devant le JAP en 2005
En tout premier lieu, du fait qu'il va être question ici de mes inclinaisons politiques et de mon évolution depuis 1987 au sein du monde carcéral, je tiens à faire une déclaration de principe : ainsi, conformément à la Constitution de la République française de 1792, repris par l'Article 35 du 26 Juin 1793 *, stipulant un droit à l'insurrection, qui a servi à Valmy pour sauvegarder et étendre la révolution, qui a servi en 1871 avec la Commune de Paris contre l'occupation Prussienne, qui a encore servi en 1940 contre l'occupation national-socialiste allemande et la collaboration pétainiste française, et pour encore servir concrètement après 1968 dans la plupart des pays d'Europe de l'Ouest avec l'insurrection armée larvée et latente contre chaque Etat capitaliste en place et contre l'OTAN ; une Constitution qui après avoir servi depuis son avènement de réfèrent à la plupart des peuples de par le monde pour se libérer des différents maux entretenus que sont, soit l'occupation étrangère, soit l'oppression de classe, soit l'exploitation de l'homme par l'homme jusqu'à l'esclavagisme, leur a ouvert une perspective politique. Et dès lors dans l'assurance qu'elle restera de même une référence au futur pour tous les peuples épris de Liberté, d'Egalité, de Fraternité et de Démocratie, conformément à cette Constitution de 1792 donc, je me refuse à abjurer ces moments historiques comme je me refuse à abjurer la stratégie de Lutte Armée pour le communiste, qui en est une expression particulière.
(
Georges Cipriani  MC Ensisheim, 49 rue de la 1ère armée 68 190 Ensisheim)


Jean-Marc dans une interview en 2005

C'est la question centrale (la question du repentir) depuis notre premier jour de prison. Et c'est le pourquoi de nos condi­tions de détention extraordi­naires, des restrictions actuelles sur le droit de communiquer ou de la censure des correspon­dances. Dans aucune des lois de l'application des peines, il n'est stipulé que le prisonnier doit ab­jurer ses opinions politiques. Mais pour nous, certains procu­reurs n'hésitent pas à affirmer que les revendications du com­munisme impliquent une récidive. Je sais bien que si nous nous repentions, nous serions soudai­nement adulés par la bonne so­ciété, mais ce n'est pas notre vi­sion de la responsabilité poli­tique. Notre engagement n'est pas à vendre ni à échanger contre un peu de liberté.
(Jean-Marc Rouillan 147575 Cd des baumettes, 230 Chemin de Morgiou Marseille Cedex 20

Joëlle à sa sortie le 16 juin 2004
Je suis fatiguée, aussi je dirai seulement trois choses :
La première est d'être bien sûr contente d'avoir la possibilité de me soigner.
La seconde est que l'application de la loi de mars 2002 reste cependant pour de nombreux prisonnières et prisonniers très en deça de son contenu même.
La troisième est ma conscience de ce que la libération de mes camarades est une bataille toujours en cours. Régis est incarcéré depuis plus de 20 ans, Georges, Nathalie et Jean-Marc, plus de 17. Je sors de prison mais je dois d'abord vaincre la maladie avant de pouvoir envisager une libération au sens propre. L'objectif reste ainsi celui de nos libérations.

Nathalie, en février 2007

Cependant, pour nous, militant-e-s emprisonné-e-s du fait du combat révolutionnaire mené par l’organisation communiste Action directe, nous sommes sûrs de notre route : celle des insoumis à l’ordre bourgeois. Tant que des femmes et des hommes porteront des idées communistes, les impérialistes au pouvoir frémiront jusqu’à ce que la peur les gèle dans leurs manoirs sécurisés à outrance.

31 mars 2013 7 31 /03 /mars /2013 18:10

Dédié à G. Abdallah, C.Gauger et S. Suder

Nous avions publié cet article en novembre 2007. Nous y disions l'importance pour nous de ce livre "Les frères de Soledad" et du combat fondateur de George Jackson. Il fait partie de ce qui a irrigué nos consciences, nos combats, nos réflexions, nos engagements.

Aujourd'hui, il y a la sortie du film sur le combat d'Angela Davis qui nous rappelle leur lutte. Et il y a cette photo d'Angela Davis qui tient l'affiche pour Georges Ibrahim Abdallah et qui nous montre qu'elle perçoit et exprime là la continuité de son combat.

Nous avions dédié en 2007 l'article à Georges Abdallah, et Georges Abdallah, six ans après (!)  est toujours emprisonné!

Nous tenons à lui dédier cette réédition ainsi qu'à Christian Gauger et Sonja Suder qui eux entre-temps sont rattrapés par la volonté d'un Etat qui ne peut tolérer leur combat d'hier et d'aujourd'hui.

De Jackson à nos luttes actuelles, c'est la même conscience et la même volonté inflexible de militants qui s'expriment. Ils sont notre espoir ...

linter - le 27 mars 2013


"Si le tremblement provoqué en nous par sa mort n'a pas cessé ...."

Ce texte est est la préface de la brochure l'Intolérable No 3 (Gallimard).
Du Groupe Information Prison (G.I.P).


postkarten_klein_150_seite_04-1.jpg(collage de Joëlle Aubron)

 


"Il est de plus en plus rare en Europe qu'un homme accepte d'être tué pour les idées qu'il défend. Les noirs en  Amérique le font chaque jour. Pour eux "la liberté ou la mort" n'est pas un slogan de mirliton. En entrant dans le Black Panther Party, les noirs savent qu'ils seront tués ou qu'ils mourront en prison. Je vais parler d'un homme célèbre maintenant, George Jackson, mais si le tremblement provoqué en nous par sa mort n'a pas cessé, nous devons savoir que tous les jours de jeunes noirs anonymes sont abattus par la police ou par des blancs dans la rue, d'autres sont torturés dans les prisons américaines. Morts, ils survivront parmi nous - ce qui est peu - mais ils vivront parmi les peuples écrasés par le monde blanc, grâce à la voix retentissante de George Jackson.

Au contraire des Américains,partis victorieux au Vietnam faire la guerre par manque d'idées, qui en reviennent cassés, les noirs entrent dans la prison ou la mort, pour en resurgir vainqueurs. Des multiples tueries de noirs, de la prison de Soledad au massacre d'Attica, assassiné par des tireurs d'élite - d'élite! -, George Jackson se relève, s'ébroue, maintenant illustre, c'est-à-dire lumineux et porteur d'une lumière si vive qu'elle le désigne et désigne tous  les Américains noirs.

Qui était George Jackson? Un noir de dix-huit ans emprisonné pendant onze ans pour complicité de  vol de soixante-dix dollars. Ecrivain magnifique, un des plus grands écrivains noirs, auteur de lettres éparses qui rassemblées, donnent un livre révolutionnaire. Frère de Jonathan Jackson, qui à dix-sept ans, entra dans le prétoire de San Rafael, libéra trois noirs en se saisissant d'un otage; le juge. Enfin, martyr décidé, c'est-à-dire conscient,assassiné le 21 août  dans la cour - ou dans une cellule - de la prison de San Quentin la veille de son jugement.

"Un noir de dix-huit emprisonné pendant onze ans pour complicité de vol."

George  fut condamné par cette sentence étrange: un an de prison ou la prison à vie. Il veut dire que Jackon fut condamné à un an de prison, mais qu'au bout de cette année, il devrait comparaître devant un "parol board" qui décide s'il sera libéré ou retenu. Le "parol board" l'a retenu onze fois et onze ans. Il est évident que les gardiens de Soledad découvraient en lui presque chaque jour, et presque à chaque instant, des mouvements d'indépendance, de fierté insupportable aux blancs, et d'une fierté qu'ils nommèrent arrogance puisqu'elle venait d'un noir. Enfin, dans la solitude et grâce à son avocate Fay Stender, et grâce à Huey.P. Newton, responsable du Black Panther Party, avec qui il communiquait, Jackson s'était politisé avec une rapidité étonnante: trop et trop vite, puisque les gardiens de Soledad dressent contre lui une embuscade. Le 13 janvier 1970, Miller - un autre tireur d'élite - du haut d'un mirador, épaule, vise tire et loupe un détenu blanc mais tue trois détenus noirs qui se bagarraient. Miller ne sera pas poursuivi ni pour meurtre ni pour homicide. Trois jours plus tard, et dans une autre division de Soledad, on trouve agonisant au pied d'un mur, le gardien John Mills, tombé du dixième étage. George Jackon - avec deux autres détenus noirs - est inculpé d'assassinat. On les transfère tous les trois à la prison californienne de San Fransisco.

"Auteur d'un livre révolutionnaire."

Il est difficile de savoir si Jackson et son livre étaient possibles avant la création du Black Panther Party, si le B.P.P. était possible avant Malcom X, lui-même possible avant les révoltes des esclaves: Nat Turner, Harriet Tubman, Frederick Douglas. Sans s'y attarder, il faut évoquer leurs noms et leurs dévouement, leurs exploits.

Quant au style de ses lettres, Jackson apporte déjà un ton nouveau dans la littérature noire; il ne se réfère plus à l'Ancien testament. Il ne cite ni les Prophètes ni les Apôtres. Il va droit au sarcasme:

"... S'il y avait un Dieu, un tout autre être qui puisse lire en mes pensées, je trouverais cela désagréable à l'extrême ..."

"... S'ils voulaient m'atteindre maintenant derrière tous mes retranchements, il faudrait que ce soit avec une balle, et définitif ..."

"... J'ai, je l'espère, tué complètement l'esclave en moi ...."

"... Ici même à Soledad, un blanc (qui n'a plus maintenant ni nom ni visage) avait poignardé aux douches un noir qui portait le même nom que moi ... Ainsi, pour une simple raison d'erreur d'identité, on s'attendait à ce que les Mexicains me fassent mon affaire ..."

"Comme vous le voyez, la plupart des détenus sont des malades, mais qui a créé le monstre en eux?"
"... Les prisons des Etats-Unis sont le dernier refuge des crétins. Les détenus sont des ratés, mais au moins, ils cherchaient quelque chose ..."

"... Les interdits sont levés quand on passe les portes des prisons. Leur comportement (des gardiens) subit alors une métamorphose: ils peuvent enfin torturer, satisfaire leur délire. Et on les paie!"
"... Ce nègre n'est vraiment pas content; je ne pardonnerai jamais, je n'oublierai jamais, et si je suis coupable de quelque chose, c'est de ne pas les avoir assez traqués. C'est la guerre sans merci."

"Que faire avec ces salauds pervertis, malsains, avides, qui veulent projeter leur ombre partout, manger à toutes les tables, qui régentent le monde avec leurs diktats racistes et leur doctrine agonisante des monopoles et des puissants groupes de pression, et leurs flics bâfreurs d'ordure qu'ils emploient à tirer sur ceux qui protestent?"

"Guerre populaire, lutte des classes, guerre de libération signifient lutte armée. Des hommes comme Hoover, Reagan, Hunt, Agnew, Johnson, Helms, Westmoreland, Abrams, Campbell, Carswell sont des hommes dangereux; ils croient dur comme fer qu'ils sont les Führers légitimes de tous les peuples du monde; il faut en finir avec eux immédiatement, Peut-on espérer convertir de tels hommes? Abandonneront-ils leur pouvoir, tant qu'ils seront en vie? Nixon ou Hugh accepteraient-ils un gouvernement populaire, une économie populaire?"

" Ce qui m'intéresse le plus dans la révolution, c'est qu'elle doit opérer au niveau de la famille: les enfants y ont un rôle, les femmes ont autant à faire que les hommes, l'éducation est égale pour tous."
"J'ai résisté à tous, à ma famille, aux religieuses, aux flics. Je sais que ma mère aime dire à tout le monde que j'étais "un bon petit", mais ce n'est pas vrai. J'ai été un voyou toute ma vie. Ce sont ces années en prison qui m'ont donné le temps et l'occasion de réfléchir et m'ont incité à réformer mon caractère. Je pense que si j'étais resté dans les rues de dix-huit ans à vingt-quatre ans, je serais probablement un drogué, un joueur de bas étage, ou un macchabée dans un cimetière. "Ils" ne le savent pas et ne l'avaient certainement pas prévu, mais ils sont responsables de ma disposition présente."
 
"Nous entendons ici des conversations détendues, banales, sur la question de savoir dans quel ordre il faut tuer tous les nègres de ce pays et par quels moyens. Ce qui me dérange, ce n'est pas qu'ils envisagent de me tuer; ça fait bientôt cinq siècles qu'ils "tuent tous les nègres", et je suis encore vivant. Je dois être le mort le plus récalcitrant de l'univers. Non ce qui me gêne, c'est que dans leurs plans, ils n'imaginent pas une seconde que je vais me défendre. Est-ce qu'ils croient vraiment cette connerie?"

"Les fascistes ont, semble-t-il, une tactique type à l'égard des classes inférieures, et c'est la même dans toute l'histoire de l'oppression. Ils dressent l'homme contre lui-même. Pensez à toutes les petites satisfactions avec lesquelles on peut nous acheter, pensez au détenu coupable d'un crime "capital" et partisan de la peine de mort! Je jure avoir entendu quelque chose de comparable aujourd'hui même!"

"Après la guerre de Sécession, la forme d'esclavage a changé: nous sommes passés de l'état de cheptel à l'esclavage économique; nous avons été jetés sur le marché du travail, mis en compétition avec les pauvres blancs dans des conditions désastreuses pour nous; depuis ce moment-là, notre principal ennemi peut être défini et identifié comme le capitalisme. L'esclavagiste était et reste le patron de l'usine, l'homme d'affaires, le responsable de l'emploi, des salaires, des prix, des institutions et de la culture nationale. C'est l'infrastructure capitaliste de l'Europe et des Etats-Unis qui est responsable du viol de l'Afrique et de l'Asie. Le capitalisme a assassiné trente millions d'hommes au Congo. Croyez-moi, ils n'auraient pas gâché toutes ces balles si ça ne leur avait pas rapporté quelque chose! Tous ces hommes qui sont allés en Afrique et en Asie, ces parasites meurtriers qui se sont abattus sur le dos de l'éléphant, n'ayant en tête que le mal, méritent bien les insultes qu'on peut leur adresser. La mort n'est que la juste rétribution de leurs crimes. Mais nous ne devons pas laisser les émotions nous envahir, l'écume de la surface  brouiller l'image d'ensemble. C'est le capitalisme qui a armé les navires, la libre-entreprise qui les a lancés, la propriété privée qui a nourri les troupes. L'impérialisme a repris la situation là où la traite l'avait laissée. C'est seulement après la fin de la traite que l'Amérique, l'Angleterre, la France et les Pays-Bas ont envahi et occupé pour de bon les terres d'Afrique et d'Asie. A mesure que la révolution industrielle s'affirmait, de nouveaux objectifs économiques remplaçaient les anciens; l'esclavage des plantations faisait place à un néo-esclavage. Le capitalisme arrimait les navires et ravitaillait les troupes. Il va de soi que c'était l'appât du gain qui l'attirait.

"C'est lui qui construit les clapiers dans lesquels on nous fait vivre. Le profit interdit réparations et entretien. La libre-entreprise a amené dans nos quartiers ses chaînes de magasins à monopole. La propriété privée a installé dans nos rues et nos maisons des légions de flics stupides à la détente facile. Ils sont là pour protéger l'entrepreneur, "sa" chaîne de magasins, "sa" banque, "ses" immeubles. Si l'homme d'affaires décidait qu'il ne veut plus nous vendre de nourriture parce que, supposons, le dollar yankee, que nous chérissons tant, a tout à coup perdu ses derniers trente sous de pouvoir d'achat, la seule manière pour le peuple de manger serait d'enfreindre la loi."

"Le capitalisme noir, c'est le noir contre lui-même. La contradiction la plus absurde d'une longue série d'abandons et de folies. Un autre remède sans douleur de dernière extrémité: être plus fasciste que le fasciste lui-même. Sylvester Brown est prêt à mourir, ou à voir mourir nos fils, pour des contrats de balayeur. Bill Cosby joue un rôle d'espion fasciste; quel message apporte-t-il à nos fils? Un message infantile! Ce méprisable individu et son acolyte leur enseignent le credo de l'esclavage, la version "nouvelle vague" du vieux serviteur nègre. Nous ne pourrons avoir confiance tant qu'il y aura des gens comme ça. Ils font partie de la répression autant, si ce n'est plus, que le vrai flic. Ne disent-ils pas à nos enfants qu'il est romantique d'être un chien couchant, Les gosses sont si contents de voir un noir tirer et se battre qu'ils ne peuvent s'empêcher de s'identifier  à ce collaborateur de l'ennemi. Le fasciste s'empare de tous les facteurs latents de division et les met en action: racisme, nationalisme, religion."
"Je suis né avec un cancer incurable, un mal pernicieux et suppurant qui m'a attaqué juste derrière les yeux et n'a cessé de s'étendre pour détruire ma paix. Il m'a volé ces vingt-huit années. Il nous a volé à tous bientôt cinq siècles. Le plus grand criminel de tous les temps. Nous devons l'arrêter maintenant."
"Maman noire, il va falloir que tu cesses de fabriquer des lâches: "sois bien gentil", "je vais être si inquiète, mon
petit", "ne te fie pas à ces nègres", "ne te laisse pas faire par ces mauvais nègres, mon petit"., "gagne bien de l'argent, mon petit". Maman noire, ton souci exagéré de la survie de tes fils se paie de la perte de leur humanité."

"Frère de son frère Jonathan."

L'affection qui unissait George à Jonathan s'était, chez le premier, tissée durant de longues heures de solitude. George avait laissé derrière lui un frère de sept ans, un enfant auquel il ne cessera jamais de s'intéresser, mais la distance est très grande entre la maison où vit Jonathan et la cellule de George. On peut se demander si George savait très bien qui était son frère, mais il fut brusquement rapproché de lui quand il sut qu'il était devenu un familier d'Angela Davis, ensuite presque confondu avec lui quand il apprit l'action incroyable de Jonathan: la tentative de sauvetage vraiment héroïque, de trois camarades noirs à la cour de San Rafael, le 7 août 1970.

Je pense qu'il ne faut pas refuser aux révolutionnaires, quand elle leur devient nécessaire, cette sorte de magnificence de la rêverie et de l'acte, surtout quand celui-ci doit devenir exemplaire, c'est-à-dire quand il sert à montrer avec éclat, le sens d'une vie qui s'est voulue un complet travail contre une fausse fatalité.

"Maintenant, Messieurs, c'est moi qui commande." Ces mots prononcés dans le prétoire de San Rafael, tout en les laissant à son frère, George semble les reprendre à son compte. Il ne s'agissait pas de s'identifier à Jonathan, au contraire même; si l'admiration que portait Jonathan à George le poussa à l'imiter, Jonathan, mort et mort libre - selon le "suicide révolutionnaire", expression de Newton -, à son tour George éprouva une admiration pour Jonathan jusqu'au point, semble-t-il, qu'il ait voulu l'imiter. On voit peut-être cette admiration torsadée des deux fils de Georgia Jackson, qui s'entraidaient à devenir un moment de la conscience noire et de la révolution.

A un an de distance, l'histoire accouche dans le sang, de deux gémeaux noirs.

"Le martyr décidé, assassiné par les blancs."

Les autorités pénitentiaires de San Quentin n'ont pas encore permis de connaître les détails de la mort réelle - je veux dire par arrêt du coeur et abaissement de la température, ce moment où un homme est devenu un corps -, de la mort réelle de Jackson. Dans son livre, dans ses lettres, dans ses conversations, il l'avait annoncée, on peut presque dire prévue, si grande était la haine des gardiens, à son égard et si puissante, "née en moi des coups infligés par cette société de possédants et de miséreux, cette flamme qui ne s'éteindra pas"; quand le directeur de la prison de San Quentin parle d'évasion, cela ne colle pas avec la "logique du vivant".

Nous avons du mal à penser que si près de son procès, décidé à en faire une tribune politique d'où il pourrait, à son tour, juger l'Amérique, Jackson ait mis au point une tentative d'évasion qui avait si peu de chances d'aboutir - on sait par exemple que Clutchette et Drumgo, ses coaccusés, et Magee, refusèrent de quitter leur cellule - mais son attitude prend un sens, si, pris au piège d'un complot monté contre lui - soit dans les salons de Reagan ou plus près, dans les bureaux du directeur de la prison -, Jackson se voyant cerné, avec peut-être un revolver à la main, a décidé, non de risquer le tout pour le tout comme on l'a écrit, mais de se précipiter vers la cour, où il était sûr d'être abattu par les "tireurs d'élite" (toujours eux) au sommet de deux miradors. Ainsi, comme Jonathan, mais coincé, il s'est décidé librement par la mort au soleil, pour le sacrifice, ou mieux, pour le "suicide révolutionnaire".

Ces quelques notes sont loin de cerner ou de peindre Jackson qui s'est continué des semaines après sa mort, dès les révoltes d'Attica, de Baltimore, hier mardi 22 septembre, dans celle de la Nouvelle-Orléans.

Le livre de jackson, Frères de Soledad et celui qui va paraître n'ont pas pour but de nous parler de Jackson seul, mais de tous les noirs anonymes enfermés dans les prisons et dans les ghettos. Retenons ceci: le mot criminel, appliqué aux noirs par des blancs, n'a pas de sens. Pour les blancs, tous les noirs sont criminels parce qu'ils sont noirs, ce qui revient à dire: dans une société de blancs, aucun noir ne peut être criminel.

J.G

Ce que nous écrivions en  2007, quand nous avions publié cet article:

On parle aujourd'hui encore de Mumia, parce que Mumia, militant des Black Panthers, continue un combat de chaque instant contre sa mort annoncée et voulue par l'Etat américain. On parle aujourd'hui de deux jeunes brûlés en France dans un transfo parce que les jeunes se sont révoltés à la suite de leur mort. On parle encore de Malik Oussékine ou de cet homme jeté dans la Seine parce que nous voulons les garder en mémoire. Et l'on parle encore de ceux qui meurent, sont emprisonnés, vivent dans la pauvreté parce qu'ils sont des ghettos et de ceux qui luttent et résistent, de ceux qui les soutiennent, parce ce que le capitalisme n'en finit pas de diviser, d'opprimer, d'exploiter et de tuer ceux qu'il perçoit comme ses "minorités".

George Jackon, aura, dans les années 60 et 70, été de cet air rouge qui forma nos consciences de militants.  Le livre de ses lettres, "Les frères de Soledad", aura irrigué nos pensées, la pensée révolutionnaire. De Puig Antich à George Jackson, des camarades de Stammheim aux Irlandais morts en grève de la faim, c'est toute une histoire, notre histoire, qui s'est écrite dans la révolte, le combat et pour certains avec "Devant leurs yeux la mort". Dans les années 70, en France, le Groupe Information Prison (G.I.P.) a beaucoup fait pour la prise de conscience de ce que cachent les barreaux de notre société. Les brochures, l'intolérable 1 - Enquête dans 20 prisons -, Intolérable 2 - enquête dans une prison-modèle: Fleury Mérogis - et ce numéro 3 "L'assassinat de George Jackson" ont été des témoignages accusateurs et mobilisateurs. Et puis il y a cette préface de Jean Genet. Jean Genet, angoisse des bourgeois, des "petits" penseurs de tous horizons, Jean Genet qui s'inscrira avec force dans la lutte pour la Palestine.

Si linter reprend cette préface, c'est afin que chacun ait en mémoire, la lutte des Black Panthers, le combat au quotidien de groupes comme le G.I.P. et aille lire, relire Genet.

Ce texte est dédié à Georges Ibrahim Abdallah, communiste libanais emprisonné depuis plus de 23 ans et dont la dernière demande de libération conditionnelle vient d'être refusée (Pour toute info, le blog liberonsgeorges.over-blog.com)

linter - novembre 2007
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26 novembre 2011 6 26 /11 /novembre /2011 19:00

Pour consulter le blog: linter.over-blog.com

 

Consulter la page L'Internationale N°1 - octobre 1983:  lire


  Beethoven contre

Mac Donald

 

L-Internationale-Beethoven-contre-Mac-Donald-copie-1.jpg

 

L'une des composantes de la lutte armée anti-impérialiste en RFA explique l'amalgame fait

entre anti-américanisme et anti-impérialisme

 

 

Les attentats de groupes fascistes dans les cités américaines et contre des officiers et des soldats américains dans la région de Francfort dans la seconde moitié de l'année 1982 nous ont d'abord été attribués par la Sécurité de l'Etat, puis, après l'arrestation du groupe Hepp, par les réformistes de gauche qui nous ont considérés comme responsables moralement.

 

Une journaliste du TAZ a mis une fois de plus dans le mille en rermerciant le BKA d'avoir arrêté ces fascistes, permettant ainsi que les groupes de la gauche armée ne soient plus rendus responsables de ces actions, soulignant de ce fait qu'un doute pouvait exister: la guérilla aurait bien été capable de ce genre d'actions d'après elle.

 

Le journal Radikal, même s'il se situe dans une tout autre perspective, prend les bombes des fascistes comme prétexte pour ouvrir une discussion sur les "cas limites" quelque part entre RZ, flics et fascistes et critique dans un seul et même contexte "les maladresses et erreurs" commises lors d'actions qui font bel et bien partie de notre mouvement.

 

Aussi nécessaire que soit justement en ce moment un débat sur les objectifs et l'organisation d'une politique armée de gauche, les attentats anti-américains de groupes fascistes sont une mauvaise base de discussion. La désorientation et l'incertitude concernant ces attentats ne sont pas explicables par un "actionnisme diffus" ou une légèreté de la politique de la gauche militante et armée qui aurait provoqué cela. On ne saurait discuter de la même façon de quelques attentats problématiques par le choix de l'objectif ou la réalisation technique, qui ont eu lieu lors de l'expulsion des squatts à Berlin, et la série des attentats fascistes. Ceux qui les amalgament ne passent pas seulement négligemment au-dessus des motivations politiques différentes de ces actions, ils empêchent que soient nommées les véritables raisons de cette désorientation : un anti-américanisme latent existant aussi au sein de la gauche allemande, une légèreté et un désintérêt qui ont fait ignorer les développements dans le spectre fasciste et les moments communs réels entre actions fascistes et opérations des services secrets et ce malgré le bain de sang de Munich en 1980, malgré Bologne, malgré les campagnes meurtrières contre des ouvriers immigrés ou des juifs. Au-delà de tout jugement moral des actions du groupe Hepp, il aurait dû devenir évident, au plus tard après les attentats dirigés contre des membres isolés de l'armée américaine, que ceux-ci se mouvaient sur une vague d'anti-américanisme que nous refusons et que nous combattons en tant que conception politique.

 

Il est malveillant d'insinuer que les attentats dirigés contre l'armée américaine, contre des installations américaines, contre la logistique de l'OTAN, contre les réseaux de communication et contre les entreprises multinationales US, revendiquées par les Cellules Révolutionnaires, la RAF et de nombreux groupes autonomes aient pu ressortir de la même ligne politique anti-américaine, ou d'une ligne comparable ou encore qu'ils aient pu la favoriser.

 

Ces actions furent toutes sans exception des actions à caractère anti-impérialiste et contenaient en elles la possibilité d'approfondir les failles et les contradictions existant au sein de l'armée américaine et de soutenir la résistance des minorités nationales et raciales. Nous avons attaqué les mess d'officiers, pas ceux des simples soldats ou pas des supermarchés. Nous avons fait exploser des bombes contre des filiales des multinationales US sans qu'aucun petit employé allemand ou américain n'aient jamais eu le moindre dommage à subir. Le quartier général de l'armée américaine à Francfort fut plusieurs fois la cible d'attentats, des actions furent dirigées contre des dépôts militaires de carburant, mais jamais contre des stations-services dans des zones d'habitation américaines. Finalement, ce n'est pas sans raison que nous avons pris la visite de Reagan en Europe et la rencontre au sommet de l'OTAN comme prétexte à une série d'actions - et non pas quelque chose comme un concert de Sammy Davis Jr ou la prolongation de la diffusion de Dallas. Les derniers attentats contre SEL à Düsseldorf et contre IBM à Reutlingen ne laissent aucun doute sur les différences.

 

Celui qui a suivi notre pratique comme nos prises de position politiques sait que nous refusons une politique diffuse dirigée contre des parties du peuple, que nous refusons le terrorisme. Les stratégies de la tension, du bain de sang sont le terrain des groupes fascistes ou des services secrets pour qui les êtres humains ne sont de toute façon que des pions qui peuvent être sacrifiés pour un maigre profit. Ils utilisent la peur de la population au profit de leur politique visant à influencer ou à modifier les institutions.

 

Nous nous considérons par contre comme une partie d'un faible courant anti-impérialiste et social-révolutionnaire en RFA et à Berlin-Ouest, à l'extension et à la stabilisation duquel nous continuerons à contribuer. Notre long combat pour la libération vient d'en bas et ne joue pas avec la vie des individus ni avec celle de nos propres camarades. Nous nous trouvons encore dans une première phase de ce processus, où il s'agit essentiellement de mener le combat pour gagner "la tête et les sentiments" des gens et justement pas une guerre.

 

Que nous employions dans cette lutte, de même que la droite et les flics, des armes et des explosifs, ne doit pas conduire à la conclusion que tout cela est du pareil au même!

 

Armes ou explosifs, machines à écrire ou à imprimer, appareils-photos ou instruments de musique peuvent être des instruments de nos luttes: cela dépend de comment nous les employons et à quel contenu ils sont rattachés.

 

La responsabilité politique des attentats anti-américains n'est pas à faire porter aux groupes de la gauche armée mais bien plutôt à une certaine partie du mouvement pacifiste qui s'adonne à un nationalisme diffus, qui propage l'idée absurde que la RFA est un "pays occupé", qui rend de bon ton le réveil du patriotisme allemand et abandonne le terrain d'une politique de gauche lorsqu'il ramène la question du stationnement des missiles à une question d'identité nationale. La frontière entre l'anti-impérialisme et la mobilisation du sentimeent anti-américain fond forcément lorsque les matadores du mouvement de la paix appuient leur protestation contre le surarmement et les Pershings en en appelant au sentiment de l'honneur des Allemands contre un esclavage quasi colonial.

 

Il y a une énorme différence entre considérer Mac Donald comme un cartel alimentaire américain qui a imposé des normes d'organisation intensives du travail aussi bien que des dégradations extrêmes des salaires et a mis en place dans le monde entier un business agro-alimentaire, et le considérer comme l'expression d'une culture "yankee". Celui qui fait de Coca Cola ici un synonyme de génocide et la forme principal d'un impérialisme culturel et le place sur le même plan que le soutien du gouvernement à presque toutes les dictatures militaires, se retire à lui-même la possibilité de comprendre l'origine fasciste des actions nationalistes ou anti-américaines.

 

Le scandale politique n'est pas le fait que les fascistes aient transformé en actions militaires rentables pour eux ces positions courantes aussi dans le mouvement de la paix. Le scandale est que ces positions puissent exister et qu'elles aient pu s'imposer dans le processus de démarcation et de combat des positions social-révolutionnaires et anti-impérialistes, mené par les réformistes de gauche de toutes tendances, dans les cartels appelant à la signature de pétitions passant par le TAZ et jusqu'aux Verts. Et qu'ainsi la volonté d'alliances du mouvement pacifiste ait conduit en partie consciemment, en partie naïvement, à des positions nationalistes ou fascistes. Le passage de groupes fascistes, d'actions extrémistes ou de terreur contre les travailleurs immigrés ou les réfugiés, à des attentats anti-américains n'est surprenant qu'au premier abord. Ils opèrent en premier lieu sur une seule et même ligne: racisme et haine des étrangers. La phrase d'Hitlier: "Dans une seule symphonie de Beethoven, il y a plus de culture que tout ce que l'Amérique a produit à ce jour." résume tous les sentiments et aversions obscures contre l'a-culture américaine, à la même notion que celle que l'on retrouve aujourd'hui dans la campagne contre les américanismes dans la langue allemande. C'est à cette tradition que se rattachent les groupes fascistes. Michael Kühnen dit à propos de la signification de l'anti-américanisme de la droite : "Historiquement, c'est un ancien courant, car nous avons dû faire la seconde guerre mondiale, c'est connu, autant contre les Etats-Unis que contre l'Union soviétique. C'est la vieille histoire de l'Europe du centre (!) qui se tourne aussi bien contre les puissances étrangères à l'Est qu'à l'Ouest. Pour nous, le problème de l'impérialisme de l'Ouest est plus important que celui de l'Est. Aujourd'hui, au-delà de cet aspect historique, il y a le point de vue de la décadence de notre culture, de notre langue, de notre musique importée chez nous par l'Amérique - et nous refusons catégoriquement cela. Il faut aussi rappeler le problème de la drogue. Le fait est que tout ce que nous combattons peut être identifié totalement par le terme d'américanisme."

 

Il est important de pouvoir discuter ici plus longuement les buts de la droite - sa programmatique : création d'un bloc européen sous hégémonie allemande - est manifeste et annonce une extension des actions anti-américaines sur le même principe dans l'avenir que le modèle déjà éprouvé. Haine de l'immigré, aversion pour tout ce qui est étranger, désignation et persécution de tout ce qui est autre, sont maintenant comme avant en RFA les motifs profondément ancrés que les fascistes intègrent dans leurs calculs. Justement dans la région Rhin-Main, il y a dans les villes et les communes où sont stationnés les soldats américains et surtout les Noirs, des sentiments racistes semblables à ceux que l'on trouve ailleurs contre les Turcs et les Arabes.

 

"Jamais depuis la guerre de trente ans, la ville a connu une telle insécurité: vols, meurtres, viols jour et nuit ... La vieille ville de Fribourg est un terrain d'entraînement civil pour nos protecteurs américains qui se saoulent, se bagarrent et violent." Ce sentiment sourd de peur avec sa composante raciste - de nombreux cafés sont interdits aux soldats américains noirs - est la base des actions anti-américaines. Ceci est d'autant plus regrettable que nous avons pris cette citation dans le TAZ du 8 avril 1982 sous le titre "Oui à l'antiaméricanisme".

 

Ce développement dans le camp fasciste a lieu parallèlement aux modificatios dans l'appareil d'Etat confirmées par les élections du 6 mars. Dans cette situation, les massacres comme à la fête de la bière en 80, qui était le point culminant d'une campagne de plusieurs services secrets voulant démontrer l'incapacité de la coalition à contrôler l'appareil d'Etat et favoriser l'élection de Strauss comme chancelier, ne sont plus à l'ordre du jour (Voir Colère révolutionnaire N°6).

 

Aujourd'hui on intensifie plutôt les efforts pour discréditer la résistance légale et illégale par des actions diffuses, pour contribuer à désorienter et à noyer les buts de la politique armée par le mélange d'actions anti-américaines avec des actions anti-impérialistes, pour construire des groupes terroristes contrôlés par la police et qui opèrent en notre nom ou sous un autre ou même sans revendiquer. C'est ainsi que les propagandistes de l'appareil policier ont tenté de nous attribuer les attentats fascistes, bien que les services de la Sûreté de l'Etat aient su dès le début que ce n'était pas nous. Plus qu'étrange est aussi le fait que Ottfried Hepp, qui aurait séjourné à Beyrouth dans les camps des Phalanges et de l'OLP, qui a été ramené en RFA par une difficile opération du BND, qui est le principal témoin à charge contre Hoffmann, qui s'est tiré du procès avec une peine ridicule qu'il n'a dû accomplir qu'à moitié, serait le principal instigateur de ce groupe. C'est justement aussi le seul qui ait pu se soustraire à l'arrestation.

L'intérêt que la Sûreté de l'Etat porte aux groupes fascistes et à leurs actions comme la protection dont ils bénéficient de la part d'une partie de l'appareil d'Etat ne signifie pas, loin de là, que la Sûreté de l'Etat ait mis en scène elle-même ces attentats. Nous considérons comme absurde cette affirmation de cette soi-disant RZ, comme quoi derrière "les actions contre-insurretionnelles" (de toute façon trop "professionnelles" pour les RZ) il y aurait obligatoirement le Parquet et que c'est sous ses ordres que le BND et le BKA auraient frappé dans les cités américaines.

 

1. Nous ne voyons pas ce qu'il y a de si professionnel dans un interrupteur et un mélage désherbant ...


2. Une telle construction nie l'existence de groupes fascistes et permet ainsi que le débat sur leurs positions comme après Munich, soit occulté dans la gauche.


3. Une telle affirmation suppose la transformation d'une domination institutionnelle et d'un pouvoir légalisé en un terrorisme mis en scène par l'Etat - développement que nous n'excluons pas dans des cas isolés et que nous considérons comme possible - mais pour lequel il n'y a actuellement aucun élément. Expliquer un tel développement par la dangerosité des RZ ou de la guérilla diffuse est l'expression d'une surestimation.

 

Le gouvernement CDU-FDP ne laissera passer aucune occasion d'enterrer la crédibilité de la réslstance légale et illégale et de la prendre encore plus en tenailles par l'augmentation de mesures répressives. La lenteur des poursuites contre le groupe Hepp sont un exemple type, les attaques policières contre Radikal ou l'Atom Express en sont le revers: là où l'on proclame qu'il y a désorientation, on veut boucher les canaux qui cherchent à la clarification.

 

Nous ne pouvons pas empêcher les actions fascistes. Mais nous pouvons nous efforcer de clarifier nos positions politiques et de rendre plus claire notre pratique. Mais cela implique dans d'autres parties de la gauche, la volonté et la capacité de mener le débat sur notre politique et sur la leur.

 

     En ce sens,

 

         Joyeuses Pâques

 

      Cellules Révolutionnaires

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12 avril 2011 2 12 /04 /avril /2011 16:42
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Le blog reprend son travail d'archives de l'Internationale. Tous les textes sont disponibles sur une page présente en permanance (voir colonne de gauche du blog):

. Les éditos des 11 numéros
. Les textes d'Action directe publiés par le journal
. Le dossier sur Porto Ricol de l'Internationale n° 1

Nous allons y placer les documents publiés ces derniers mois en particulier le dossier sur la lutte des Noirs américains ou les éléments du dossier Irlande.

Nous commençons aujourd'hui la publication du dossier sur une lutte menée au Canada par "Direct Action".

Nous proposons cependant aux amis et camarades qui souhaiteraient l'un ou l'autre de ces dossiers ou des articles qu'il contient de nous contacter.

CANADA

 De l'action directe à l'action antiimpérialiste

 

Le Canada est par excellence le pays dépendant des Etats-Unis ayant en apparence tous les attributs de l'Etat souverain (suffisamment développé pour apparaître comme tel). Le Canada est un pays riche en matières premières et surtout en possibilités énergétiques. Les grandes entreprises multinationales en profitent largement.

 

Dans ce pays, la lutte anti-impérialiste est donc particulière. Elle est d'autant plus difficile que le capital doit mettre tout en jeu pour interdire la prise de conscience révolutionnaire, du fait de l'importance économique du Canada et, surtout, de la proximité de la frontière commune avec les Etats-Unis.

 

Pour ce faire, le capital exploite le sentiment de la partie anglophone de même appartenance à une communauté culturelle, et comme en Allemagne, tente de faire du pays l'une des vitrines de l'Occident, offrant le mode de vie américain - en d'autres termes l'exploitation et l'aliénation capitalistes - comme modèle, comme rêve et réalité.

 

Comme dans d'autres lieux, c'est par le biais de l'identité culturelle que le capital tente d'imposer sa domination, de diviser la Classe. Comme ailleurs, c'est par le biais de la différence d'identité que se fait le clivage politique, puis la rupture.

 

Ainsi, les anglophones sont dans un premier temps plus aisément récupérés et gagnés au système alors que c'est au Québec que se développent d'abord les formes d'opposition radicale autour de la revendication d'indépendance. Les limites de cette opposition apparaissent cependant ultérieurement en même temps que les capacités de réaction et d'assimilation du capital quand il s'agit de revendication nationale.

 

C'est ce qui se passe au Québec où la revendication nationale prend la forme radicale et intéressante du F.L.Q qui marqua l'histoire francophone dans les années 70. Certes, le F.L.Q. combat aussi pour l'émancipation sociale dans la mesure où le clivage économique rejoint, comme en Irlande, et par des phénomènes économiques explicables, le clivage culturel. La lutte globale n'est cependant pas la propriété du FLQ et c'est ce qui permet à l'Etat de vaincre. En utilisant ses deux solutions traditionnelles: la force par le démantèlement du FLQ et la solution douce, la solution social-démocrate qui enlève toute force révolutionnaire au mouvement national. Le parti de Levesque joue ce rôle  à merveille. Cependant, l'exploitation demeure, et avec elle, l'inéluctabilité de la lutte des classes.

 

Aujourd'hui, la lutte prend d'autres formes et concerne aussi la partie anglophone. Elle gagne en dimension internationaliste ce qu'elle perd en revendication nationaliste. Elle s'apparente au sabotage à grande échelle et touche des éléments plus fondamentaux du système.

 

Cette lutte prend naissance en 1980 avec les premières actions - en souvenir de Stammheim 1977 - contre Mercedes Benz, en 1981 contre le consulat américain  en solidarité avec le peuple du Salvador. En 1981, "Résistance" commence à paraître qui pose le problème de la lutte armée comme forme de lutte.

 

Cependant, c'est le groupe "Direct  Action" qui impose cette idée dans la pratique par deux actions: le dynamitage de la station d'alimentation d'Hydro B.C. sur l'île de Vancouver et surtout l'action contre l'entreprise Litton qui fabrique les systèmes de guidage des missiles Cruise américains.

 

Cette dernière action est l'une des seules dans le monde qui ait eu pour objet la destrcution réelle de ces engins de mort alors que partout, les mouvements se limitaient à une position défensive ou passive face à l'installation des missiles, se contentant de manifester ou de protester tout en annonçant l'apocalypse proche. Cette action plaçait directement le groupe dans la lignée de groupes européens tels que la RAF, les BR etc, ou de groupes nord-américains pour lesquels l'action armée n'est pas symbole, mais but pratique.

 

Mais il est vrai que ce groupe part d'une tout autre réalité et d'une tout autre identité. Il est d'une part l'expression de la faiblesse du mouvement de classe, de la mémoire communiste dans le pays. D'autre part, il se place dans la tradition libertaire de l'action directe et apparaît comme l'expression radicale du mouvement écologiste pacifiste et féministe. Des actions ont été revendiquées par la "Wimmin'fire Brigade" contre les boîtes de vidéo pornos qui diffusent des films de viol.

 

Les deux attaques de "Direct Action" ont amené une réaction hyperviolente de l'Etat, avec perquisitions, interpellations, interrogatoires, qui a touché l'ensemble du mouvement de Vancouver. Toronto et Montréal, toutes communautés  (féministes, écolos, pacifistes etc) confondues.

 

Aujourd'hui, cinq personnes sont dans les taules canadiennes: July Belmas,Gerry Annah, Ann Hansen, Dong Stuart et Brent Taylor.

 

Le mouvement qui les soutient est énorme, d'autant plus que les cinq étaient très connus et intégrés au mouvement. Dans toutes les villes existent des comités. Des publications permettent de suivre leurs déclarations, leurs procès, leur combat, leurs conditions de détention.

 

Dans ce dossier, nous publions les communiqués de "Direct Action", des textes inspirés de "Résistance" et d'autres documents.

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20 juillet 2010 2 20 /07 /juillet /2010 11:29

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Introduction

 

La devise "batasuna" 'Union nous a paru devoir servir de titre au livre que nous présentons: ce choix exceptionnel correspond en effet au programme politique actuel du peuple basque.

 

La présente publication (qui sera surtout faite de documents consacrés à la torture) ambitionne surtout de confirmer l'union des forces révolutionnaires qui oeuvrent au sein de la politique basque provoquant comme réponse de l'appareil oppresseur la répression méthodique infligée à notre peuple.

 

Nous croyons pouvoir ainsi apporter quelque appui en même temps qu'une première base pour la création de l'instrument politique qui mènera la lutte du peuple.

 

Cet instrument politique, qui doit se former, s'appelle "Front du peuple". En fait, depuis déjà trois ans, fonctionne une sorte d'embryon, qui a vu, par suite des objectifs atteints chaque année, le début pro-unionniste se transformer en réalités plus palpables.

 

Pour cette année 197O, cette campagne d'union, Batasuna, paraît vraiment porteuse d'espérance. Nous nous trouvons même l'un des mouvements révolutionnaires du peuple à avoir précisément consacré toute son activité politique de l'année à la réalisation du programme "Année du Front du peuple".

 

Cette année 197O est celle de la commémoration du 33ème anniversaire du bombardement de Guernica; le 26 avril et le 1er mai, des manifestations inspirées par le slogan Batasuna, capable d'unifier toutes les forces du peuple, ont été organisées.

 

Enfin, vu notre sentiment d'être un anneau de la chaîne, une pièce dans l'engrenage international, nous lançons un appel de solidarité à tous les peuples qui luttent env ue d'objectifs identiques; pour que notre peuple, en communion avec tous les opprimés, poursuive son processus révolutionnaire de totale libération.

 

A l'orée du XXième siècle, la pratique des tortures décrites ici apparaît si scandaleuse et extraordinaire que les lecteurs peuvent être tentés de douter de leur authenticité.

 

Certains peuvent même penser qu'il s'agit de discréditer le gouvernement espagnol et d'inventer à cette fin des récis révoltants.

 

Nous sommes conscients qu'il est difficile de croire à ceux où l'anonymat de la victime a été respecté. Mais que le lecteur se rende compte que l'état de clandestinité dans lequel le peuple basque est obligé de vivre. Cette clandestinité impose des normes élémentaires de prudence.

 

Dans quelques cas, nous nous trouvons tenus de cacher le nom et l'adrese du témoin, soit parce qu'il n'est pas encore jugé et alors il ne convient pas de révéler son identité; soit parce qu'il est libre et qu'il risque d'être victime de représailles..

 

Quoi qu'il en soit, les témoins dont les déclarations sont publiées dans ces pages sont disposés à les ratifier et les confirmer à un organisme ou une personne offrant toute garantie et désirant se livrer à une enquête sérieuse.

 

D'autre part, les manuscrits de ces déclarations signées par les intéressés eux-mêmes peuvent être vérifiés par ces organismes ou personnes qui le désirent.

 

Tout ce qui est exposé ici ne constitue qu'un reflet de la réalité, des exemples de tortures dont souffre le Pays basque.

 

Nous pourrions multiplier les témoignages puisque, depuis 3O ans que dure la dictature du général Franco, les personnes torturées au Pays basque se comptent par milliers et depuis ces dernières années par centaines.

 

En aucune manière, et pour aussi dramatique qu'elle puisse apparaître, une confession écrite ne peut traduire complètement la cruauté, le sadisme des tortionnaires et la souffrance, l'angoisse, le déséquilibre des victimes de ces méthodes inhumaines. Nous voulons dénoncer ici la monstruosité de certains jugements, de certaines condamnations prononcées par les tribunaux spéciaux d'ordre public et militaires.

 

Ce livre a été rédigé collectivement, ce qui explique une certaine disparité. La multiplicité de ses auteurs constitue, nous semble-t-il, la contrepartie de cette lacune.

 

batasuna

la répression

au pays basque

 

cahiers libres 177-178

FRANCOIS MASPERO

1970.


SOMMAIRE

 

L'économie basque de 1955 à 1067

La pratique politico-syndicale au pays basque depuis 1936

Les forces culturelles de 1959 à 1969

Le clergé basque de 1960 à 1969

Les forces de répression

Instruments et méthodes de torture

Témoignages

Documents publiés

Conclusion: le silence autour de la torture


Anniversaire de la disparition de Bruno Baudrillart. "Euskal Herria, terre d'asile". Extrait de Bribes

 

 

 

 


 


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25 juin 2010 5 25 /06 /juin /2010 16:41

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Irlande - Renforcer le courant anti-impérialiste

 

Transmettre les documents publiés dans l'Internationale, souvent d'une grande rareté, reste l'un des principaux objectifs du blog. Est en cours par exemple la publication du dossier de l'Internationale N°2: les Noirs américains dans l'Empire qui documente la lutte des militants noirs et du mouvement anti-impérialiste dans les années 80. Des camarades ayant appris la publication dans le journal de documents sur les luttes révolutionnaires en Irlande, et nous ayant interrogés à ce propos, nous saisissons l'occasion de les mettre à disposition sur le blog et commençons par l'interview de Jim Lane.

 

En relisant cette interview, nous vérifions à nouveau combien la ligne de l'Internationale était cohérente et peut encore servir aujourd'hui de point de réflexion. Car le choix de la publication de l'interview de Jim Lane et de faire connaître l'IRSP, n'était bien entendu pas dû au hasard et l'Internationale soulignait l'effort de ce courant pour renforcer : "un courant marxiste pour qui la question nationale n'est qu'une des dimensions de la lutte de classe en Irlande et n'est qu'un des moments de la lutte pour le socialisme."

 

Ainsi la tâche définie par Jim Lane pour l'IRSP ne reste-t-elle pas d'actualité en Irlande comme ailleurs: "Nous devons, toujours plus, rechercher, étudier et débattre pour développer davantage la théorie révolutionnaire qui est nécessaire à la réalisation de la libération nationale et du socialisme en Irlande."


Et la remarque suivante ne s'applique-t-elle pas parfaitement à l'explosion des nationalisme depuis deux décennies soutenus par les forces impérialistes: "Le nationalisme encouragé par des pouvoirs impérialistes comme l'Angleterre ou les USA, est définitivement réactionnaire parce qu'il obscurcit la lutte de classe et met le peuple au service de l'impérialisme"

 

A consulter: la vie Jim Lane sur :http://antifa.fr/liberation-irlande/


Documents se trouvant dans le numéro 6:

   Présentation: Irlande - Renforcer le courant anti-impérialiste

   Interview de l'INLA

   Interview d'un dirigeant de l'INLA (Dominic McGlinchey)

   Jim Lane, de l'IRSP

Dans le numéro 7,

   Une double page intérieure constituait le dossier mensuel et s'intitulait: Irlande, un mailloncaché du dispositif   atlantiste


DOCUMENT DE L'INTERNATIONALE N° 6février 1984

Irlande - Renforcer le courant anti-impérialiste

L'Internationale, mensuel publié de décembre 1983 à novembre 1984

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JIM LANE, de l'IRSP


Cette interview de Jim Lane, dirigeant de l'IRSP, formé dans les luttes prolétariennes contre le chômage, a été publiée par le journal de ce parti en septembre dernier. C'est-à-dire à un moment de lutte intense au sein du mouvement républicain pour le renforcement d'un courant marxiste pour qui la question nationale n'est qu'une des dimensions de la lutte de classe en Irlande et n'est qu'un des moments de la lutte pour le socialisme. Cette interview s'insère donc dans ce contexte interne au mouvement républicain, et c'est ainsi qu'il faut comprendre le pressant encouragement à l'étude et à la politisation, dans un pays où nombre de ceux qui prennent les armes contre l'occupant ne le font pas nécessairement d'un point de vue de classe, comme le démontre la persistance d'un point de vue étroitement nationaliste que combat justement l'IRSP.

__________________________________________________________

 

. Comment vois-tu l'IRSP se développer dans les prochaines années?

 

J'aimerais voir une plus grande accentuation de l'éducation politique dans le parti. Nous devons, toujours plus, rechercher, étudier et débattre pour développer davantage la théorie révolutionnaire qui est nécessaire à la réalisation de la libération nationale et du socialisme en Irlande. Sans théorie révolutionnaire, tous nos efforts seront vains. La plupart de nos militants s'est engagée dans l'activité révolutionnaire à partir de l'expérience de l'oppression ouverte des forces impérialistes britanniques ou de la violence du chômage et des conditions sociales déplorables au Nord et au Sud. Nous n'avons jamais manqué de combattre l'oppression. Mais nous ferions bien d'être attentifs aux observations de James Connolly selon lesquelles "normalement, les Irlandais ne sont pas des philosophes, ils procèdent trop rapidement de la pensée à l'action." Il n'est pas suffisant  de combattre courageusement pour une cause. Il est aussi nécessaire de voir clairement les objectifs que nous poursuivons, sans quoi les fruits de notre lutte pourraient profiter aux contre-révolutionnaires. Si nous combattons pour le socialisme aujourd'hui, ce n'est pas pour le brader demain. Cela pourrait facilement nous arriver. Personnellement je crois que seul un parti fondé sur les principes marxistes-léninistes peut réaliser le socialisme en Irlande.

 

. Ceci concerne le développement interne au parti, mais comment conçois-tu ton intervention?

 

Depuis sa fondation, le parti a subi les attaques de l'impérialisme et de ses laquais. Le combat pour imposer son existence politique a causé de grands préjudices et a affaibli notre capacité à nous engager plus pleinement dans la lutte de classe. C'est à ce niveau que j'espère une amélioration. Nous devons nous efforcer de contribuer plus aux  luttes de tous ceux qui sont opprimés par le capitalisme. Le développement de nos théories révolutionnaires doit se rapporter à la pratique afin d'enraciner d'inébranlables fondements à la classe ouvrière. Nous devons, à l'Irsp, fournir les mêmes efforts dans le combat contre le capitalisme que ceux fournis dans le combat héroïque de ceux qui sont engagés dans la lutte armée contre les Britanniques. Nous devons être extrêmement actifs dans les combats menés sur des questions comme le chômage, le droit des femmes, la neutralité, la réduction des salaires etc.

 

. Quelle différence y a-t-il entre l'Irsp et Sinn Fein?

 

La différence essentielle consiste en ce que l'IRSP est en premier lieu un parti socialiste alors que Sinn Fein est avant tout un parti républicain. Nous approchons les problèmes d'un autre point de vue.  L'Irsp juge la situation d'un point de vue socialiste. Les intérêts de la classe ouvrière irlandaise priment tout. La raison de notre engagement dans la lutte de libération nationale est que nous croyons que la résolution de la question nationale est une condition nécessaire au socialisme en Irlande.

 

D'autre part, Sinn Fein voit l'indépendance nationale comme son principal objectif. Lorsque nous considérons une situation d'un point de vue socialiste, il regarde la même situation d'un point de vue républicain / nationaliste, ce qui a bien sûr pour effet de faire primer les considérations nationalistes sur les intérêts principaux de la classe ouvrière. Au cours de ces dernières années, ils ont été vers une plus grande compréhension du potentiel révolutionnaire de la classe ouvrière, mais ils ont cherché à le limiter à un accroissement de la lutte contre la partition [entre Nord et Sud, ndt]. En bref, leur socialisme est social-démocrate. Il existe une incertitude sur le fait que la majorité d'entre eux ne recherche qu'une société plus libre et plus démocratique que ce que nous avons maintenant, mais s'arrêterait au seuil du renversement total du système social, politique et économique tel qu'il existe actuellement. De toutes façons, je crois qu'il y a dans le mouvement républicain un bon nombre de révolutionnaires socialistes qui, pour des raisons historiques ne font pas aujourd'hui partie de notre mouvement.

 

. Que réponds-tu à ceux qui disent que tout nationalisme est réactionnaire dans le monde aujourd'hui?

 

Je crois que le nationalisme du peuple opprimé de l'Irlande occupée par les Britanniques est certainement progressiste parce qu'il l'unit dans une lutte contre l'ennemi principal, l'impérialisme britannique.

 

Il y a évidemment des occasions où le nationalisme est réactionnaire. Le nationalisme encouragé par des pouvoirs impérialistes comme l'Angleterre ou les USA, est définitivement réactionnaire parce qu'il obscurcit la lutte de classe et met le peuple au service de l'impérialisme. Il n'y a pas de situation noire ou blanche. Dire que tout  nationalisme est réactionnaire est aussi stupide que de dire que tout nationalisme est progressiste. Je crois que tout ce qui aide l'impérialisme britannique et nuit au peuple opprimé est réactionnaire, tandis que tout ce qui aide  le peuple et nuit à l'impérialisme britannique est progressiste.

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3 avril 2008 4 03 /04 /avril /2008 22:45

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Vu sur un site ("infojeunes") après alerte google rosa luxemburg, cette annonce un peu surréaliste quand on regarde ce qui l'entoure. La rubrique s'appelle : Livres / BD / Mangas

Sortie en mai 2008

La guerre mondiale ne sert ni la défense nationale ni les intérêts économiques ou politiques des masses populaires quelles qu'elles soient, c'est uniquement un produit  de rivalités impérialistes entre les classes capitalistes de différents pays pour la suprématie mondiale. (...) Les intérêts nationaux ne sont qu'une mystification. (...)

La paix mondiale ne peut être préservée par des plans utopiques ou foncièrement réactionnaires, tels que des tribunaux internationaux de diplomates capitalistes, des « alliances politiques européennes » (...). On ne pourra pas éliminer ou même enrayer l'impérialisme, le militarisme et la guerre aussi longtemps que les classes capitalistes exerceront leur domination de classe de manière incontestée. Le seul moyen de leur résister avec succès et de préserver la paix mondiale, c'est la capacité d'action politique du prolétariat international et sa volonté révolutionnaire de jeter son poids dans labalance.

L'ouvrage :
La Crise de la social-démocratie, également appelée «brochure de Junius », a été écrite en prison en 1915. Cette édition se base sur la traduction de l'allemand effectuée par Raymond Renaud en 1934, partiellement revue par nos soins. Notre correction majeure est d'avoir remplacé le terme d'origine « démocratie socialiste » par le terme « social-démocratie », ainsi que l'ensemble de ses dérivés, afin que le lecteur puisse mieux comprendre de quoi il s'agit.

L'auteure :

Fille de commerçants juifs, Rosa Luxemburg naît en 1871 à Zamosc en Pologne. Théoricienne marxiste, son activité militante au sein du parti socialiste révolutionnaire « Prolétariat », menée en parallèle de ses études au lycée de Varsovie, l'oblige à s'exiler en Suisse très jeune. Elle poursuit à Zurich des études d'économie politique, lance le journal La Cause ouvrière et cofonde le Parti social-démocrate du royaume de Pologne.

Naturalisée allemande, elle s'installe en Allemagne en 1898 et s'engage au Parti socialdémocrate. Elle rejoint également la Deuxième Internationale, où elle anime l'aile gauche marxiste, s'opposant aux tendances réformistes de Bernstein ou Millerand.

Lorsque la Révolution éclate en Russie, Luxemburg regagne la Pologne pour participer à l'élan insurrectionnel. Arrêtée, elle manque d'être exécutée. De retour en Allemagne en 1906, ses prises de position antimilitaristes lui valent deux nouvelles arrestations et plusieurs séjours en prison. C'est la révolution allemande qui la délivre en 1918.

Exclue du SPD, elle s'investit alors clandestinement dans l'organisation du mouvement révolutionnaire spartakiste qui se déclenche le 5 janvier 1919. Cependant l'insurrection échoue et subit une sanglante répression de la part des sociaux-démocrates nouvellement à la tête du pouvoir. Rosa Luxemburg est alors arrêtée, avant d'être exécutée le 15 janvier.
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22 décembre 2007 6 22 /12 /décembre /2007 20:29
Pour consulter le blog: linter.over-blog.com
Sur le blog, un texte un peu long mais qui a été écrit en même temps - 1915 -  et sur les mêmes bases que l'Internationale.

Un texte qu'il faut lire et relire pour sa description de l'entrée en guerre des pays dans un absurde enthousiasme, pour l'évocation  des profiteurs qui tout de suite s'installent. C'est un texte qui aurait été bienvenu le 11 novembre pour rappeler que ce jour devrait être un moment de réflexion sur le militarisme, la guerre et sur ce qui les crée et les utilise: le capitalisme, l'impérialisme. C'est un texte où il suffit de changer les noms des belligérants pour retrouver la réalité des guerres d'aujourd'hui.
C'est un texte très facile à lire tant il nous parle et nous emporte.
Car c'est une photographie fidèle, tellement fidèle car écrit au sein même du conflit.
Mais c'est surtout une réflexion sur le double langage des courants réformistes au sein du mouvement ouvrier même quand ils se disent révolutionnaires. On suit ainsi comment la social-démocratie de l'époque qui se prétendit si longtemps contre la guerre, se rallia comme un seul homme dans tous les pays jusqu'à se faire les instruments et les gestionnaires du conflit qui coûta des millions et des millions de vies. C'est alors une réflexion sur les conséquences pour les prolétaires abusés et qui s'abusent alors eux-mêmes. C'est ainsi une véritable réflexion sur le combat révolutionnaire.

Rappelons que Rosa Luxemburg déjà condamnée en février 1914 pour ses déclarations lors d'un meeting (lire ici) a passé ensuite pour les mêmes raisons l'essentiel de la guerre en prison.


"La classe ouvrière paie cher toute nouvelle prise de conscience de sa vocation historique. Le Golgotha de sa libération est pavé de terribles sacrifices. Les combattants des journées de Juin, les victimes de la Commune, les martyrs de la Révolution russe - quelle ronde sans fin de spectres sanglants ! Mais ces hommes-là sont tombés au champ d'honneur, ils sont, comme Marx l'écrivit à propos des héros de la Commune, « ensevelis à jamais dans le grand coeur de la classe ouvrière ». Maintenant, au contraire, des millions de prolétaires de tous les pays tombent au champ de la honte, du fratricide, de l'automutilation, avec aux lèvres leurs chants d'esclaves. Il a fallu que cela aussi ne nous soit pas épargné."
undefined(collage de Joëlle Aubron)
(Brochure de Rosa Luxemburg écrite en prison en 1915 et tirant les premières leçons de l'effondrement de la social-démocratie. Elle deviendra célèbre sous le nom de "brochure de Junius", pseudonyme utilisé par l'auteur, en référence à un pamphlétaire anti-absolutiste anglais)

La scène a changé fondamentalement. La marche des six semaines sur Paris a pris les proportions d'un drame mondial ; l'immense boucherie est devenue une affaire quotidienne, épuisante et monotone, sans que la solution, dans quelque sens que ce soit, ait progressé d'un pouce. La politique bourgeoise est coincée, prise à son propre piège : on ne peut plus se débarrasser des esprits que l'on a invoqués.

  Finie l'ivresse. Fini le vacarme patriotique dans les rues, la chasse aux automobiles en or ; les faux télégrammes successifs ; on ne parle plus de fontaines contaminées par des bacilles du choléra, d'étudiants russes qui jettent des bombes sur tous les ponts de chemin de fer de Berlin, de Français survolant Nuremberg ; finis les débordements d'une foule qui flairait partout l'espion ; finie la cohue tumultueuse dans les cafés où l'on était assourdi de musique et de chants patriotiques par vagues entières ; la population de toute une ville changée en populace, prête à dénoncer n'importe qui, à molester les femmes, à crier : hourra ! et à atteindre au paroxysme du délire en lançant elle-même des rumeurs folles ; un climat de crime rituel, une atmosphère de pogrome, où le seul représentant de la dignité humaine était l'agent de police au coin de la rue.

  Le spectacle est terminé. Les savants allemands, ces « lémures vacillants », sont depuis longtemps, au coup de sifflet, rentrés dans leur trou. L'allégresse bruyante des jeunes filles courant le long des convois ne fait plus d'escorte aux trains de réservistes et ces derniers ne saluent plus la foule en se penchant depuis les fenêtres de leur wagon, un sourire joyeux aux lèvres ; silencieux, leur carton sous le bras, ils trottinent dans les rues où une foule aux visages chagrinés vaque à ses occupations quotidiennes.
  Dans l'atmosphère dégrisée de ces journées blêmes, c'est un tout autre choeur que l'on entend : le cri rauque des vautours et des hyènes sur le champ de bataille. Dix mille tentes garanties standard ! Cent mille kilos de lard, de poudre de cacao, d'ersatz de café, livrables immédiatement, contre payement comptant ! Des obus, des tours, des cartouchières, des annonces de mariage pour veuves de soldats tombés au front, des ceinturons de cuir, des intermédiaires qui vous procurent des contrats avec l'armée - on n'accepte que les offres sérieuses ! La chair à canon, embarquée en août et septembre toute gorgée de patriotisme, pourrit maintenant en Belgique, dans les Vosges, en Masurie, dans des cimetières où l'on voit les bénéfices de guerre pousser dru. Il s'agit d'engranger vite cette récolte. Sur l'océan de ces blés, des milliers de mains se tendent, avides de rafler leur part.

  Les affaires fructifient sur des ruines. Des villes se métamorphosent en monceaux de décombres, des villages en cimetières, des régions entières en déserts, des populations entières en troupes de mendiants, des églises en écuries. Le droit des peuples, les traités, les alliances, les paroles les plus sacrées, l'autorité suprême, tout est mis en pièces. N'importe quel souverain par la grâce de Dieu traite son cousin, s'il est dans le camp adverse, d'imbécile, de coquin et de parjure, n'importe quel diplomate qualifie son collègue d'en face d'infâme fripouille, n'importe quel gouvernement assure que le gouvernement adverse mène son peuple à sa perte, chacun vouant l'autre au mépris public ; et des émeutes de la faim éclatent en Vénétie, à Lisbonne, à Moscou, à Singapour ; et la peste s'étend en Russie, la détresse et le désespoir, partout.

  Souillée, déshonorée, pataugeant dans le sang, couverte de crasse ; voilà comment se présente la société bourgeoise, voilà ce qu'elle est. Ce n'est pas lorsque, bien léchée et bien honnête, elle se donne les dehors de la culture et de la philosophie, de la morale et de l'ordre, de la paix et du droit, c'est quand elle ressemble à une bête fauve, quand elle danse le sabbat de l'anarchie, quand elle souffle la peste sur la civilisation et l'humanité qu'elle se montre toute nue, telle qu'elle est vraiment.

  Et au coeur de ce sabbat de sorcière s'est produit une catastrophe de portée mondiale : la capitulation de la social-démocratie internationale. Ce serait pour le prolétariat le comble de la folie que de se bercer d'illusions à ce sujet ou de voiler cette catastrophe : c'est le pire qui pourrait lui arriver. « Le démocrate » (c'est-à-dire le petit-bourgeois révolutionnaire) dit Marx, « sort de la défaite la plus honteuse aussi pur et innocent que lorsqu'il a commencé la lutte : avec la conviction toute récente qu'il doit vaincre, non pas qu'il s'apprête, lui et son parti, à réviser ses positions anciennes, mais au contraire parce qu'il attend des circonstances qu'elles évoluent en sa faveur. » Le prolétariat moderne, lui, se comporte tout autrement au sortir des grandes épreuves de l'histoire. Ses erreurs sont aussi gigantesques que ses tâches. Il n'y a pas de schéma préalable, valable une fois pour toutes, pas de guide infaillible pour lui montrer le chemin à parcourir. Il n'a d'autre maître que l'expérience historique. Le chemin pénible de sa libération n'est pas pavé seulement de souffrances sans bornes, mais aussi d'erreurs innombrables. Son but, sa libération, il l'atteindra s'il sait s'instruire de ses propres erreurs. Pour le mouvement prolétarien, l'autocritique, une autocritique sans merci, cruelle, allant jusqu'au fond des choses, c'est l'air, la lumière sans lesquels il ne peut vivre.

  Dans la guerre mondiale actuelle, le prolétariat est tombé plus bas que jamais. C'est là un malheur pour toute l'humanité. Mais c'en serait seulement fini du socialisme au cas où le prolétariat international se refuserait à mesurer la profondeur de sa chute et à en tirer les enseignements qu'elle comporte.

  Ce qui est en cause actuellement, c'est tout le dernier chapitre de l'évolution du mouvement ouvrier moderne au cours de ces vingt-cinq dernières années. Ce à quoi nous assistons, c'est à la critique et au bilan de l'oeuvre accomplie depuis près d'un demi-siècle. La chute de la Commune de Paris avait scellé la première phase du mouvement ouvrier européen et la fin de la Ire Internationale. A partir de là commença une phase nouvelle. Aux révolutions spontanées, aux soulèvements, aux combats sur les barricades, après lesquels le prolétariat retombait chaque fois dans son état passif, se substitua alors la lutte quotidienne systématique, l'utilisation du parlementarisme bourgeois, l'organisation des masses, le mariage de la lutte économique et de la lutte politique, le mariage de l'idéal socialiste avec la défense opiniâtre des intérêts quotidiens immédiats. Pour la première fois, la cause du prolétariat et de son émancipation voyait briller devant elle une étoile pour la guider : une doctrine scientifique rigoureuse. A la place des sectes, des écoles, des utopies, des expériences que chacun faisait pour soi dans son propre pays, on avait un fondement théorique international, base commune qui faisait converger les différents pays en un faisceau unique. La théorie marxiste mit entre les mains de la classe ouvrière du monde entier une boussole qui lui permettait de trouver sa route dans le tourbillon des événements de chaque jour et d'orienter sa tactique de combat à chaque heure en direction du but final, immuable.

  C'est le parti social-démocrate allemand qui se fit le représentant, le champion et le gardien de cette nouvelle méthode. La guerre de 1870 et la défaite de la Commune de Paris avaient déplacé vers l'Allemagne le centre de gravité du mouvement ouvrier européen. De même que la France avait été le lieu par excellence de la lutte de classe prolétarienne pendant cette première phase, de même que Paris avait été le coeur palpitant et saignant de la classe ouvrière européenne à cette époque, de même la classe ouvrière allemande devint l'avant-garde au cours de la deuxième phase.

  Au prix de sacrifices innombrables, par un travail minutieux et infatigable, elle a édifié une organisation exemplaire, la plus forte de toutes ; elle a créé la presse la plus nombreuse, donné naissance aux moyens de formation et d'éducation les plus efficaces, rassemblé autour d'elle les masses d'électeurs les plus considérables et obtenu le plus grand nombre de sièges de députés. La social-démocratie allemande passait pour l'incarnation la plus pure du socialisme marxiste. Le parti social-démocrate occupait et revendiquait une place d'exception en tant que maître et guide de la II° Internationale. En 1895, Friedrich Engels écrivit dans sa préface célèbre à l'ouvrage de Marx les luttes de classes en France :

  « Mais, quoi qu'il arrive dans d'autres pays, la social-démocratie allemande a une position particulière et, de ce fait, du moins dans l'immédiat, aussi une tâche particulière. Les deux millions d'électeurs qu'elle envoie aux urnes, y compris les jeunes gens et les femmes qui sont derrière eux en qualité de non-électeurs, constituent la masse la plus nombreuse et la plus compacte, le " groupe de choc " décisif de l'armée prolétarienne internationale. »

  La social-démocratie allemande était, comme l'écrivit la Wiener Arbeiterzeitung le 5 août 1914 « le joyau de l'organisation du prolétariat conscient. » La social-démocratie française, italienne et belge, les mouvements ouvriers de Hollande, de Scandinavie, de Suisse et des États-Unis marchaient sur ses traces avec un zèle toujours croissant. Quant aux Slaves, les Russes et les sociaux-démocrates des Balkans, ils la regardaient avec une admiration sans bornes, pour ainsi dire inconditionnelle. Dans la II° Internationale, le « groupe de choc » allemand avait un rôle prépondérant. Pendant les congrès, au cours des sessions du bureau de l'Internationale socialiste, tout était suspendu à l'opinion des Allemands. En particulier lors des débats sur les problèmes posés par la lutte contre le militarisme et sur la question de la guerre, la position de la social-démocratie allemande était toujours déterminante. « Pour nous autres Allemands, ceci est inacceptable » suffisait régulièrement à décider de l'orientation de l'Internationale. Avec une confiance aveugle, celle-ci s'en remettait à la direction de la puissante social-démocratie allemande tant admirée : elle était l'orgueil de chaque socialiste et la terreur des classes dirigeantes dans tous les pays.

  Et à quoi avons-nous assisté en Allemagne au moment de la grande épreuve historique ? A la chute la plus catastrophique, à l'effondrement le plus formidable. Nulle part l'organisation du prolétariat n'a été mise aussi totalement au service de l'impérialisme, nulle part l'état de siège n'est supporté avec aussi peu de résistance, nulle part la presse n'est autant bâillonnée, l'opinion publique autant étranglée, la lutte de classe économique et politique de la classe ouvrière aussi totalement abandonnée qu'en Allemagne.

  Or, la social-démocratie allemande n'était pas seulement l'avant-garde la plus forte de l'Internationale, elle était aussi son cerveau. Aussi faut-il commencer par elle, par l'analyse de sa chute ; c'est par l'étude de son cas que doit commencer le procès d'autoréflexion. C'est pour elle une tâche d'honneur que de devancer tout le monde pour le salut du socialisme international, c'est-à-dire de procéder la première à une autocritique impitoyable. Aucun autre parti, aucune autre classe de la société bourgeoise ne peut étaler ses propres fautes à la face du monde, ne peut montrer ses propres faiblesses dans le miroir clair de la critique, car ce miroir lui ferait voir en même temps les limites historiques qui se dressent devant elle et, derrière elle, son destin. La classe ouvrière, elle, ose hardiment regarder la vérité en face, même si cette vérité constitue pour elle l'accusation la plus dure, car sa faiblesse n'est qu'un errement et la loi impérieuse de l'histoire lui redonne la force, lui garantit sa victoire finale.
  L'autocritique impitoyable n'est pas seulement pour la classe ouvrière un droit vital, c'est aussi pour elle le devoir suprême. Sur notre navire, nous transportions les trésors les plus précieux de l'humanité confiés à la garde du prolétariat, et tandis que la société bourgeoise, flétrie et déshonorée par l'orgie sanglante de la guerre, continue de se précipiter vers sa perte, il faut que le prolétariat international se reprenne, et il le fera, pour ramasser les trésors que, dans un moment de confusion et de faiblesse au milieu du tourbillon déchaîné de la guerre mondiale, il a laissé couler dans l'abîme.

  Une chose est certaine, la guerre mondiale représente un tournant pour le monde. C'est une folie insensée de s'imaginer que nous n'avons qu'à laisser passer la guerre, comme le lièvre attend la fin de l'orage sous un buisson pour reprendre ensuite gaiement son petit train. La guerre mondiale a changé les conditions de notre lutte et nous a changés nous-mêmes radicalement. Non que les lois fondamentales de l'évolution capitaliste, le combat de vie et de mort entre le capital et le travail, doivent connaître une déviation ou un adoucissement. Maintenant déjà, au milieu de la guerre, les masques tombent et les vieux traits que nous connaissons si bien nous regardent en ricanant. Mais à la suite de l'éruption du volcan impérialiste, le rythme de l'évolution a reçu une impulsion si violente qu'à côté des conflits qui vont surgir au sein de la société et à côté de l'immensité des tâches qui attendent le prolétariat socialiste dans l'immédiat toute l'histoire du mouvement ouvrier semble n'avoir été jusqu'ici qu'une époque paradisiaque. Historiquement, cette guerre était appelée à favoriser puissamment la cause du prolétariat. Chez Marx qui, avec un regard prophétique, a découvert au sein du futur tant d'événements historiques, on peut trouver dans les luttes de classes en France ce remarquable passage :

  « En France, le petit bourgeois fait ce que, normalement, devrait faire le bourgeois industriel ; l'ouvrier fait ce qui, normalement, serait la tâche du petit-bourgeois ; et la tâche de l'ouvrier, qui l'accomplit ? Personne. On ne la résout pas en France, en France on la proclame. Elle n'est nulle part résolue dans les limites de la nation ; la guerre de classes au sein de la société française s'élargit en une guerre mondiale où les nations se trouvent face à face. La solution ne commence qu'au moment où, par la guerre mondiale, le prolétariat est mis à la tête du peuple qui domine le marché mondial, à la tête de l'Angleterre. La révolution, trouvant là non son terme, mais son commencement d'organisation, n'est pas une révolution au souffle court. La génération actuelle ressemble aux Juifs que Moïse conduit à travers le désert. Elle n'a pas seulement un nouveau monde à conquérir, il faut qu'elle périsse pour faire place aux hommes qui seront à la hauteur du nouveau monde. »

  Ceci fut écrit en 1850, à une époque où l'Angleterre était le seul pays capitaliste développé, où le prolétariat anglais était le mieux organisé et semblait appelé à prendre la tête de la classe ouvrière internationale grâce à l'essor économique de son pays. Remplacez l'Angleterre par l'Allemagne et les paroles de Marx apparaissent comme une préfiguration géniale de la guerre mondiale actuelle. Cette guerre était appelée à mettre le prolétariat allemand à la tête du peuple et ainsi à produire un « début d'organisation » en vue du grand conflit général international entre le Capital et le Travail pour le pouvoir politique. Et quant à nous, avons-nous présenté d'une façon différente le rôle de la classe ouvrière dans la guerre mondiale ? Rappelons-nous comment naguère encore nous décrivions l'avenir :

  Alors arrivera la catastrophe. Alors sonnera en Europe l'heure de la marche générale, qui conduira sur le champ de bataille de 16 à 18 millions d'hommes, la fleur des différentes nations, équipés des meilleurs instruments de mort et dressés les uns contre les autres. Mais, à mon avis, derrière la grande marche générale, il y a le grand chambardement. Ce n'est pas de notre faute : c'est de leur faute. Ils poussent les choses à leur comble. Ils vont provoquer une catastrophe. Ils récolteront ce qu'ils ont semé. Le crépuscule des dieux du monde bourgeois approche. Soyez-en sûrs, il approche ! »
 
Voilà ce que déclarait l'orateur de notre fraction, Bebel, au cours du débat sur le Maroc au Reichstag.
 
Ce tract officiel du parti, Impérialisme ou Socialisme, qui a été diffusé il y a quelques années à des centaines de milliers d'exemplaires, s'achevait sur ces mots :

 « Ainsi la lutte contre le capitalisme se transforme de plus en plus en un combat décisif entre le Capital et le Travail. Danger de guerre, disette et capitalisme - ou paix, prospérité pour tous, socialisme ; voilà les termes de l'alternative. L'histoire va au-devant de grandes décisions. Le prolétariat doit inlassablement oeuvrer à sa tâche historique, renforcer la puissance de son organisation, la clarté de sa connaissance. Dès lors, quoi qu'il puisse arriver, soit que, par la force qu'il représente, il réussisse à épargner à l'humanité le cauchemar abominable d'une guerre mondiale, soit que le monde capitaliste ne puisse périr et s'abîmer dans le gouffre de l'histoire que comme il en est né, c'est-à-dire dans le sang et la violence, à l'heure historique la classe ouvrière sera prête et le tout est d'être prêt.  »
 Dans le Manuel pour les électeurs sociaux-démocrates de l'année 1911, destiné aux dernières élections parlementaires, on peut lire à la page 42, à propos de la guerre redoutée :

 « Est-ce que nos dirigeants et nos classes dirigeantes croient pouvoir exiger de la part des peuples une pareille monstruosité ? Est-ce qu'un cri d'effroi, de colère et d'indignation ne va pas s'emparer d'eux et les amener à mettre fin à cet assassinat ? »

« Ne vont-ils pas se demander : pour qui et pourquoi tout cela ? Sommes-nous donc des malades mentaux, pour être ainsi traités ou pour nous laisser traiter de la sorte ? »

 « Celui qui examine à tête reposée la possibilité d'une grande guerre européenne ne peut aboutir qu'à la conclusion que voici : La prochaine guerre européenne sera un jeu de va-tout sans précédent dans l'histoire du monde, ce sera selon toute probabilité la dernière guerre. »

 C'est dans ce langage et en ces termes que nos actuels députés au Reichstag firent campagne pour leurs 110 mandats. Lorsqu'en été 1911 le saut de panthère de l'impérialisme allemand sur Agadir et ses cris de sorcière eurent rendu imminent le péril d'une guerre européenne, une assemblée internationale réunie à Londres adopta le 4 août la résolution suivante :
 
« Les délégués allemands, espagnols, anglais, hollandais et français des organisations ouvrières se déclarent prêts à s'opposer avec tous les moyens dont ils disposent à toute déclaration de guerre. Chaque nation représentée prend l'engagement d'agir contre toutes les menées criminelles des classes dirigeantes, conformément aux décisions de son Congrès national et du Congrès international. »

Cependant, lorsqu'en novembre 1912 le Congrès international se réunit à Bâle, alors que le long cortège des délégués ouvriers arrivait à la cathédrale, tous ceux qui étaient présents furent saisis d'un frisson devant la solennité de l'heure fatale qui approchait et ils furent pénétrés d'un sentiment d'héroïque détermination.

 Le froid et sceptique Victor Adler s'écriait :

« Camarades, il est capital que, nous retrouvant ici à la source commune de notre pouvoir, nous y puisions la force de faire ce que nous pouvons dans nos pays respectifs, selon les formes et les moyens dont nous disposons et avec tout le pouvoir que nous possédons, pour nous opposer au crime de la guerre. Et si cela devait s'accomplir, si cela devait réellement s'accomplir, alors nous devons tâcher que ce soit une pierre, une pierre de la fin. » 

 « Voilà le sentiment qui anime toute l'Internationale. »

« Et si le meurtre et le feu et la pestilence se répandent à travers l'Europe civilisée - nous ne pouvons y penser qu'en frémissant et la révolte et l'indignation nous déchirent le coeur. Et nous nous demandons : les hommes, les prolétaires, sont-ils vraiment encore des moutons, pour qu'ils puissent se laisser mener à l'abattoir sans broncher ?... »

 Troelstra prit la parole au nom des « petites nations » ainsi qu'au nom de la Belgique :

« Le prolétariat des petits pays se tient corps et âme à la disposition de l'Internationale pour tout ce qu'elle décidera en vue d'écarter la menace de guerre. Nous exprimons à nouveau l'espoir que, si un jour les classes dirigeantes des grands États appellent aux armes les fils de leur prolétariat pour assouvir la cupidité et le despotisme de leurs gouvernements dans le sang des petits peuples et sur leur sol - alors, grâce à l'influence puissante de leurs parents prolétaires et de la presse prolétarienne, les fils du prolétariat y regarderont à deux fois avant de nous faire du mal à nous, leurs amis et leurs frères, pour servir cette entreprise contraire à la civilisation. »

 Et après avoir lu le manifeste contre la guerre au nom du bureau de l'Internationale, Jaurès conclut ainsi son discours :

« L'Internationale représente toutes les forces morales du monde ! Et si sonnait un jour l'heure tragique qui exige de nous que nous nous livrions tout entiers, cette idée nous soutiendrait et nous fortifierait. Ce n'est pas à la légère, mais bien du plus profond de notre être que nous déclarons : nous sommes prêts à tous les sacrifices ! »

 C'était comme un serment de Rutli. Le monde entier avait les yeux fixés sur la cathédrale de Bâle, où les cloches sonnaient d'un air grave et solennel pour annoncer la grande bataille à venir entre l'armée du Travail et la puissance du Capital.

Le 3 décembre 1912, David, l'orateur du groupe social-démocrate, déclarait au Reichstag :

 « Ce fut une des plus belles heures de ma vie, je l'avoue. Lorsque les cloches de la cathédrale accompagnèrent le cortège des sociaux-démocrates internationaux, lorsque les drapeaux rouges se disposaient dans le choeur de l'église autour de l'autel, et que le son de l'orgue saluait les délégués des peuples qui venaient proclamer la paix - j'en ai gardé une impression absolument inoubliable. ... Les masses cessent d'être des troupeaux dociles et abrutis. C'est un élément nouveau dans l'histoire. Auparavant les peuples se laissaient aveuglément exciter les uns contre les autres par ceux qui avaient intérêt à la guerre, et se laissaient conduire au meurtre massif. Cette époque est révolue. Les masses se refusent désormais à être les instruments passifs et les satellites d'un intérêt de guerre, quel qu'il soit.  »

Une semaine encore avant que la guerre n'éclate, le 26 juillet 1914, les journaux du parti allemand écrivaient :

 « Nous ne sommes pas des marionnettes, nous combattons avec toute notre énergie un système qui fait des hommes des instruments passifs de circonstances qui agissent aveuglément, de ce capitalisme qui se prépare à transformer une Europe qui aspire à la paix en une boucherie fumante. Si ce processus de dégradation suit son cours, si la volonté de paix résolue du prolétariat allemand et international qui apparaîtra au cours des prochains jours dans de puissantes manifestations ne devait pas être en mesure de détourner la guerre mondiale, alors, qu'elle soit à moins la dernière guerre, qu'elle devienne le crépuscule des dieux du capitalisme. » (Frankfurter Volksstimme.)
 
Le 30 juillet 1914, l'organe central de la social-démocratie allemande s'écriait :

 « Le prolétariat socialiste allemand décline toute responsabilité pour les événements qu'une classe dirigeante aveuglée jusqu'à la démence est en train de provoquer. Il sait que pour lui une nouvelle vie s'élèvera des ruines. Les responsables, ce sont ceux qui aujourd'hui détiennent le pouvoir ! »

« Pour eux, il s'agit d'une question de vie ou de mort ! »
 
 « L'histoire du monde est le tribunal du monde. »

 Et c'est alors que survint cet événement inouï, sans précédent : le 4 août 1914. Cela devait-il arriver ainsi ? Un événement d'une telle portée n'est certes pas le fait du hasard. Il doit résulter de causes objectives profondes et étendues. Cependant ces causes peuvent résider aussi dans les erreurs de la social-démocratie qui était le guide du prolétariat, dans la faiblesse de notre volonté de lutte, de notre courage, de notre conviction. Le socialisme scientifique nous a appris à comprendre les lois objectives du développement historique. Les hommes ne font pas leur histoire de toutes pièces. Mais ils la font eux-mêmes. Le prolétariat dépend dans son action du degré de développement social de l'époque, mais l'évolution sociale ne se fait pas non plus en dehors du prolétariat, celui-ci est son impulsion et sa cause, tout autant que son produit et sa conséquence. Son action fait partie de l'histoire tout en contribuant à la déterminer. Et si nous pouvons aussi peu nous détacher de l'évolution historique que l'homme de son ombre, nous pouvons cependant bien l'accélérer ou la retarder.

 Dans l'histoire, le socialisme est le premier mouvement populaire qui se fixe comme but, et qui soit chargé par l'histoire, de donner à l'action sociale des hommes un sens conscient, d'introduire dans l'histoire une pensée méthodique et, par là, une volonté libre. Voilà pourquoi Friedrich Engels dit que la victoire définitive du prolétariat socialiste constitue un bond qui fait passer l'humanité du règne animal au règne de la liberté. Mais ce « bond » lui-même n'est pas étranger aux lois d'airain de l'histoire, il est lié aux milliers d'échelons précédents de l'évolution, une évolution douloureuse et bien trop lente. Et ce bond ne saurait être accompli si, de l'ensemble des prémisses matérielles accumulées par l'évolution, ne jaillit pas l'étincelle de la volonté consciente de la grande masse populaire. La victoire du socialisme ne tombera pas du ciel comme fatum, cette victoire ne peut être remportée que grâce à une longue série d'affrontements entre les forces anciennes et les forces nouvelles, affrontements au cours desquels le prolétariat international fait son apprentissage sous la direction de la social-démocratie et tente de prendre en main son propre destin, de s'emparer du gouvernail de la vie sociale. Lui qui était le jouet passif de son histoire, il tente d'en devenir le pilote lucide.

Friedrich Engels a dit un jour : « La société bourgeoise est placée devant un dilemme : ou bien passage au socialisme ou rechute dans la barbarie. » Mais que signifie donc une « rechute dans la barbarie » au degré de civilisation que nous connaissons en Europe aujourd'hui ? Jusqu'ici nous avons lu ces paroles sans y réfléchir et nous les avons répétées sans en pressentir la terrible gravité. Jetons un coup d'oeil autour de nous en ce moment même, et nous comprendrons ce que signifie une rechute de la société bourgeoise dans la barbarie. Le triomphe de l'impérialisme aboutit à l'anéantissement de la civilisation - sporadiquement pendant la durée d'une guerre moderne et définitivement si la période des guerres mondiales qui débute maintenant devait se poursuivre sans entraves jusque dans ses dernières conséquences. C'est exactement ce que Friedrich Engels avait prédit, une génération avant nous, voici quarante ans.

 Nous sommes placés aujourd'hui devant ce choix : ou bien triomphe de l'impérialisme et décadence de toute civilisation, avec pour conséquences, comme dans la Rome antique, le dépeuplement, la désolation, la dégénérescence, un grand cimetière ; ou bien victoire du socialisme, c'est-à-dire de la lutte consciente du prolétariat international contre l'impérialisme et contre sa méthode d'action : la guerre. C'est là un dilemme de l'histoire du monde, un ou bien - ou bien encore indécis dont les plateaux balancent devant la décision du prolétariat conscient. Le prolétariat doit jeter résolument dans la balance le glaive de son combat révolutionnaire : l'avenir de la civilisation et de l'humanité en dépendent. Au cours de cette guerre, l'impérialisme a remporté la victoire. En faisant peser de tout son poids le glaive sanglant de l'assassinat des peuples, il a fait pencher la balance du côté de l'abîme, de la désolation et de la honte. Tout ce fardeau de honte et de désolation ne sera contrebalancé que si, au milieu de la guerre, nous savons retirer de la guerre la leçon qu'elle contient, si le prolétariat parvient à se ressaisir et s'il cesse de jouer le rôle d'un esclave manipulé par les classes dirigeantes pour devenir le maître de son propre destin.

La classe ouvrière paie cher toute nouvelle prise de conscience de sa vocation historique. Le Golgotha de sa libération est pavé de terribles sacrifices. Les combattants des journées de Juin, les victimes de la Commune, les martyrs de la Révolution russe - quelle ronde sans fin de spectres sanglants ! Mais ces hommes-là sont tombés au champ d'honneur, ils sont, comme Marx l'écrivit à propos des héros de la Commune, « ensevelis à jamais dans le grand coeur de la classe ouvrière ». Maintenant, au contraire, des millions de prolétaires de tous les pays tombent au champ de la honte, du fratricide, de l'automutilation, avec aux lèvres leurs chants d'esclaves. Il a fallu que cela aussi ne nous soit pas épargné. Vraiment nous sommes pareils à ces Juifs que Moïse a conduits à travers le désert. Mais nous ne sommes pas perdus et nous vaincrons pourvu que nous n'ayons pas désappris d'apprendre. Et si jamais le guide actuel du prolétariat, la social-démocratie, ne savait plus apprendre, alors elle périrait « pour faire place aux hommes qui soient à la hauteur d'un monde nouveau ».
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30 novembre 2007 5 30 /11 /novembre /2007 20:17
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L'Internationale, rappelons-le, a choisi en 1983 en toute conscience, le nom du journal publié en 1915 par Rosa Luxemburg. C'est pourquoi nous reprenons la publication de textes de cette militante, commencée aux débuts du blog, pour mieux faire connaître son combat contre le capitalisme, contre l'impérialisme,
contre la réforme et pour la révolution.

Le combat de Rosa luxemburg contre la guerre, on le sait, la conduit en prison dès le début du conflit. mais cela l'avait déjà amenée dès février 1914 devant les tribunaux pour l'agitation antimilitariste inlassable qu'elle menait dans ses textes, dans les meetings, dans ses cours. Ici sa déclaration devant le tribunal de Francfort. linter
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"Le jour où la classe ouvrière comprend et décide de ne plus tolérer de guerres, la guerre devient impossible."

Sur le plan juridique, mes défenseurs (1) ont suffisamment montré le néant de l´acte d´accusation en ce qui concerne les faits qui me sont reprochés. Je voudrais par conséquent éclairer un autre aspect de l´accusation. Aussi bien dans les interventions de M. le procureur que dans l´acte d´accusation lui-même, ce qui prend grande importance ce ne sont pas seulement les déclarations qu´on m´impute mais, plus encore, l´interprétation qu´on en propose et la tendance que mes paroles recèleraient. A plusieurs reprises et avec beaucoup d´insistance, M. le procureur a souligné ce que, d´après lui, je savais et voulais, lorsque dans ces meetings je prononçais les paroles incriminées. Or, pour aborder cet aspect psychologique de mon discours, s´agissant de ma conscience, personne n´est sans doute plus compétent que moi, personne n´est mieux que moi en situation de fournir des éclaircissements exhaustifs.

 D´entrée de jeu, je souhaite faire une remarque. Je suis tout à fait disposée à fournir à M. le procureur et à vous, Messieurs les Juges, ces éclaircissements exhaustifs. Pour aller tout de suite à l´essentiel, je tiens à déclarer que ce que le procureur, s´appuyant sur les rapports de ses témoins principaux, a décrit comme étant ma façon de penser, comme mes intentions et mes sentiments, n´est rien qu´une caricature plate et bornée, tant de mes discours que des méthodes d´agitation social-démocrates en général. En écoutant avec attention les déclarations du procureur, je n´ai pu m´empêcher de rire intérieurement. Je me disais : voici encore un exemple classique prouvant qu´il ne s´agit pas de posséder une culture formelle pour saisir dans leur subtilité scientifique et leur profondeur historique les modes de pensée sociaux-démocrates, pour comprendre nos idées dans toute leur complexité, dès lors que fait obstacle à cette intelligence l´appartenance à une classe sociale donnée. Si, Messieurs les Juges, de tous les gens présents aux réunions que je tenais, vous aviez interrogé l´ouvrier le plus frustre, il vous eût donné une tout autre image, une tout autre impression de ce que j´ai dit. Oui, les hommes et les femmes les plus simples du peuple travailleur sont sans doute en mesure de comprendre nos idées qui, dans le cerveau d´un procureur prussien, se reflètent comme dans un miroir déformant. Je voudrais démontrer maintenant ce que je viens de dire en examinant quelques points précis.

M. le procureur a répété à plusieurs reprises que, même avant d´avoir prononcé les paroles qui me sont imputées à crime et qui auraient constitué l´apogée de mon discours, j´avais déchaîné la « haine » de mes auditeurs. Je déclare à ce propos : Monsieur le Procureur, nous autres sociaux-démocrates, nous ne déchaînons jamais la haine. Que signifie en effet « déchaîner la haine » ? Ai-je donc essayé d´inculquer à mes auditeurs le mot d´ordre suivant : « Si jamais, vous autres Allemands, vous vous trouvez, au cours d´une guerre, en pays ennemi, en Chine par exemple, alors conduisez-vous de telle sorte que d´un siècle un Chinois n´ose regarder un Allemand de travers » (2) ? Ah ! si j´avais parlé ainsi, alors il y aurait eu effectivement incitation à la haine. Ou bien ai-je essayé d´exciter dans les masses venues m´écouter l´arrogance nationaliste, le chauvinisme, le mépris et la haine d´autres races et d´autres peuples ? Si tel était le cas il y aurait eu effectivement incitation à la haine.

Mais je n´ai pas tenu de tels propos et aucun social-démocrate éduqué ne tient de tels propos. Ce que j´ai fait dans ce meeting de Francfort et ce que nous faisons toujours, nous autres sociaux-démocrates, par nos paroles et nos écrits, c´est informer, faire prendre conscience aux masses laborieuses de leurs intérêts de classe et de leurs tâches historiques, leur montrer les grandes lignes du développement historique, la tendance des bouleversements économiques, politiques et sociaux qui s´accomplissent au sein de la société actuelle ; ce processus historique implique, avec une nécessité d´airain, qu´à un certain niveau de développement de l´ordre social actuel celui-ci sera inéluctablement éliminé et remplacé par l´ordre social socialiste qui lui est supérieur. Voilà l´agitation que nous menons, voilà comment, par l´action exaltante des perspectives historiques, sur le terrain desquelles nous nous plaçons, nous élevons également la conscience morale des masses. C´est de ces points de vue élevés que nous menons également notre agitation contre la guerre et le militarisme, - parce que chez nous, sociaux-démocrates, toutes nos idées s´harmonisent en une conception du monde cohérente, scientifiquement fondée. Et si M. le procureur ainsi que son pitoyable témoin à charge considèrent tout cela comme une simple excitation à la haine, la grossièreté et le simplisme de ce jugement résultent uniquement de l´incapacité du procureur à penser en termes sociaux-démocrates.

En outre, à plusieurs reprises, M. Le procureur général à fait allusion à des appels à « assassiner leurs supérieurs » que j´aurais lancés aux soldats. Ces appels camouflés à abattre les officiers (mais, selon lui, parfaitement intelligibles pour tous) dévoileraient tout particulièrement la noirceur de mon âme et la nocivité de mes intentions. Eh bien, je vous demande de tenir pour exactes, ne fût-ce qu´un bref instant, les déclarations qu´on m´a prêtées ; réfléchissez un peu : vous serez obligés de convenir que le procureur, dans le louable dessein de me dépeindre sous les couleurs les plus noires, s´est, dans ce cas, complètement fourvoyé. Quand aurais-je en effet appelé à l´assassinat ? Et contre quels supérieurs ? L´acte d´accusation lui-même affirme que j´ai préconisé l´introduction en Allemagne du système de la milice ; j´ai indiqué que l´essentiel dans ce système c´est l´obligation pour les hommes d´emporter chez eux leurs armes individuelles - comme cela se passe en Suisse - et à ce moment, notez-le bien à ce moment, j´ai ajouté qu´il pourrait se faire que le coup de feu partît dans une direction autre que celle qui plairait aux maîtres en place. Il est donc évident que le procureur m´accuse d´avoir incité les soldats à assassiner non pas les supérieurs de l´actuelle armée allemande, mais les supérieurs de la future milice allemande. On combat avec la plus grande vigueur notre propagande en faveur du système de la milice, et dans l´acte d´accusation on m´impute précisément à crime cette propagande et, simultanément, le procureur se croit obligé de défendre la vie des officiers de cette milice honnie, que j´aurais menacée ; un pas encore et M. le procureur dans l´ardeur du combat va m´accuser d´avoir incité mes auditeurs à commettre des attentats contre le président de la future République allemande !

Mais qu´ai-je dit en réalité s´agissant de ce qu´on appelle l´incitation à l´assassinat des supérieurs ? Quelque chose de tout à fait différent. Dans mon discours j´avais montré que d´ordinaire les défenseurs de l´actuel militarisme justifient leur position en invoquant la nécessité de la défense nationale. Si ce souci de l´intérêt national était sincère et honnête, alors, c´est ce que j´ai expliqué, les classes dominantes n´auraient qu´à mettre en pratique la revendication déjà ancienne du programme social-démocrate, c´est-à-dire le système de la milice ; car, disais-je, ce système est le seul moyen de garantir sûrement la défense de la patrie ; en effet, seul un peuple libre qui part en campagne contre l´ennemi par libre décision constitue un rempart suffisamment sûr pour la liberté et l´indépendance de son pays. C´est alors seulement que l´on pourrait chanter « Chère patrie, tu peux dormir tranquille » ! Et j´ai posé la question : pourquoi les défenseurs officiels de la patrie ne veulent-ils pas entendre parler de ce système de défense, le seul efficace ? Simplement parce que ce qui leur importe au premier chef, ce n´est pas la défense de la patrie, ce sont des guerres impérialistes, des guerres de conquête, pour lesquelles il est vrai la milice ne vaut rien. Et puis les classes dominantes craignent sans doute de mettre les armes dans les mains du peuple laborieux, parce que les exploiteurs ont mauvaise conscience et qu´ils ont peur que le coup de feu, un jour, ne parte dans une direction qui ne plairait pas aux maîtres en place.

On voit donc que, sur rapport de son témoin numéro 1, le procureur m´attribue ce que j´ai dit de la crainte des classes dominantes comme si je l´avais pris à mon compte. Voilà qui prouve une fois encore que son incapacité totale à suivre l´argumentation social-démocrate lui brouille le cerveau.

Toute aussi fausse est l´affirmation contenue dans l´acte d´accusation selon laquelle j´aurais recommandé de suivre l´exemple hollandais. Dans ce pays, les soldats de l´armée coloniale ont le droit d´abattre un supérieur qui les maltraite. En réalité, à propos du militarisme et des mauvais traitements infligés aux soldats, j´ai évoqué à ce moment-là la figure mémorable de Bebel, notre dirigeant, et j´ai rappelé à ce propos qu´un des chapitres les plus importants de sa vie a été la lutte qu´il a menée au Reichstag contre les sévices infligés aux soldats. Pour illustrer ce point, j´ai cité des extraits de plusieurs discours de Bebel puisés dans le compte rendu sténographique des débats du Reichstag. La loi, autant que je sache n´interdit pas ces citations. En particulier, j´ai cité les déclarations qu´il fit en 1893 sur cet usage en vigueur dans l´armée coloniale hollandaise. Vous voyez donc, messieurs, que le zèle du procureur lui a fait ici encore commettre une bévue : en tout état de cause ce n´est pas contre moi, mais contre quelqu´un d´autre qu´il aurait dû dresser son acte d´accusation.

Mais j´en viens au point essentiel de l´accusation. Voici le grief principal du procureur : j´aurais, dans les déclarations incriminées, appelé les soldats, en cas de guerre, à ne pas tirer sur l´ennemi. Il aboutit à ce résultat par une déduction qui lui parait d´une logique contraignante. Voici le raisonnement : étant donné que je faisais de l´agitation contre le militarisme, étant donné que je voulais empêcher la guerre, je ne pouvais manifestement choisir d´autre voie, je ne pouvais envisager d´autre moyen efficace que cet appel direct aux soldats : si on vous donne l´ordre de tirer, ne tirez pas. N´est-ce pas, Messieurs les Juges, une belle conclusion, d´une concision convaincante, d´une logique irrésistible ! Permettez-moi pourtant de vous le déclarer : cette logique et cette conclusion résultent des conceptions de M. le procureur, non des miennes, non des idées de la social-démocratie. Ici je sollicite tout particulièrement votre attention. Je dis : la conclusion selon laquelle le seul moyen efficace d´empêcher la guerre consisterait à s´adresser directement aux soldats et à les appeler à ne pas tirer, cette conclusion n´est que l´envers de la conception selon laquelle tout est pour le mieux dans l´État, aussi longtemps que le soldat obéit aux ordres de ses supérieurs, selon laquelle, pour dire les choses brièvement, le fondement de la puissance de l´État et du militarisme, c´est l´obéissance passive, l´obéissance absolue (3) du soldat. Cette conception de M. le procureur se trouve harmonieusement complétée par celle du chef suprême des armées telle qu´elle a été diffusée officiellement. Recevant le roi des Hellènes à Potsdam le 6 novembre de l´an passé, l´empereur a dit que le succès des armées grecques prouve « que les principes adoptés par notre état-major général et nos troupes sont toujours les garants de la victoire s´ils sont appliqués correctement ». L´état-major avec ses « principes » et l´obéissance passive du soldat, telles sont les bases de la stratégie militaire et la garantie de la victoire. Eh bien, nous autres sociaux-démocrates, nous ne partageons pas cette façon de voir. Nous pensons au contraire que ce ne sont pas seulement l´armée, les « ordres » d´en haut et l´ « obéissance » aveugle d´en bas qui décident du déclenchement et de l´issue des guerres, mais que c´est la grande masse du peuple travailleur qui décide et qui doit en décider. Nous sommes d´avis qu´on ne peut faire la guerre que dès lors et aussi longtemps que la masse laborieuse ou bien l´accepte avec enthousiasme parce qu´elle tient cette guerre pour une guerre juste et nécessaire, ou bien la tolère patiemment. Si au contraire la grande majorité du peuple travailleur aboutit à la conviction - et faire naître en elle cette conviction, développer cette conscience, c´est précisément la tâche que nous, sociaux-démocrates, nous assignons - si, disais-je, la majorité du peuple aboutit à la conviction que les guerres sont un phénomène barbare, profondément immoral, réactionnaire et contraire aux intérêts du peuple, alors les guerres deviennent impossibles - quand bien même, dans un premier temps, le soldat continuerait à obéir aux ordres de ses chefs ! Selon la conception du procureur, c´est l´armée qui fait la guerre ; selon notre conception, c´est le peuple tout entier. C´est à lui de décider de la guerre et de la paix. La question de l´existence ou de la suppression du militarisme actuel, c´est la masse des hommes et des femmes travailleurs, des jeunes et des vieux, qui peut la trancher et non pas cette petite portion du peuple qui s´abrite, comme on dit, dans les basques du roi.

J´ai bien tenu ce raisonnement et j´ai sous la main un témoignage classique établissant que c´est bien là ma conception, notre conception.

Par hasard, je suis en mesure de répondre à la question du procureur de Francfort en citant un discours que j´ai prononcé à Francfort. Il me demandait à qui je pensais quand j´ai dit : « nous ne le ferons pas. » Le 17 avril 1910, j´ai parlé ici au Cirque Schuman, devant 6 000 personnes environ, de la lutte contre le mode de scrutin en Prusse - vous vous en souvenez, à cette époque-là, notre campagne battait son plein. Et je trouve dans le compte rendu sténographique de ce discours, page 10, le passage suivant :

« Mesdames et Messieurs, dans notre lutte actuelle pour la réforme du système électoral prussien comme dans toutes les questions politiques importantes en Allemagne, je dis que nous ne pouvons compter que sur nous seuls. Mais nous qui est-ce ? Nous ce sont les milliers de prolétaires, hommes et femmes, de Prusse et d´Allemagne. Nous sommes beaucoup plus qu´un simple chiffre. Nous sommes les millions de ceux qui font vivre la société par leur travail de leurs mains. Et il suffit que ce fait très simple s´incruste dans la conscience des masses les plus larges du prolétariat d´Allemagne pour qu´un jour sonne l´heure où, en Prusse, on montrera à la réaction régnante que le monde peut bien vivre sans les hobereaux transelbiens, sans les comtes du Zentrum, sans conseillers secrets et à la rigueur même sans procureurs, mais qu´il ne peut pas exister, ne serait-ce que 24 heures, si les ouvriers croisent leurs bras. »

Vous le voyez, dans ce passage, je dis clairement où se situe pour nous le centre de gravité de la vie politique et des destinées de l´État : dans la conscience, dans la volonté lucide, dans la résolution de la grande masse laborieuse. Et c´est exactement de la même manière que nous concevons la question du militarisme. Le jour où la classe ouvrière comprend et décide de ne plus tolérer de guerres, la guerre devient impossible.

Mais j´ai bien d´autres preuves que telle est bien notre conception de l´agitation à propos des questions militaires. Je ne puis d´ailleurs m´empêcher d´exprimer ma surprise. M. le procureur se donne le plus grand mal pour triturer mes paroles en vue d´en extraire, par des interprétations, des suppositions, des déductions arbitraires, la manière dont j´aurais l´intention de lutter contre la guerre. Or il dispose sur ce sujet de preuves à foison. C´est que notre propagande antimilitariste nous ne la développons pas dans l´ombre, dans le secret, non, nous le faisons dans la lumière éclatante des réunions publiques. Depuis des dizaines d´années, la lutte contre le militarisme constitue un des points essentiels de notre agitation. Déjà à l´époque de la Première Internationale, elle a fait l´objet de discussions et de résolutions dans tous les congrès internationaux ou presque, ainsi que dans les congrès du parti allemand. M. le procureur n´aura eu qu´à puiser dans l´activité de toute une génération, et, où qu´il eût plongé la main, il eût fait des prises intéressantes. Je ne puis malheureusement étaler devant vous ici l´ensemble des documents. Permettez-moi au moins de vous citer l´essentiel.

En 1868, le Congrès de Bruxelles de l´Internationale propose déjà des mesures pratiques en vue d´empêcher la guerre. En particulier, on lit la résolution :

« Considérant que les peuples peuvent donc dès maintenant diminuer le nombre des guerres en s´opposant à ceux qui les font ou qui les déclarent ;
« Que ce droit appartient surtout aux classes ouvrières, soumises presque exclusivement au service militaire et qu´elles seules peuvent lui donner une sanction ;
« Qu´elles ont pour cela un moyen pratique, légal et immédiatement réalisable ;
« Qu´en effet le corps social ne saurait vivre si la production est arrêtée pendant un certain temps ; qu´il s´agit donc aux producteurs de cesser de produire pour rendre impossibles les entreprises des gouvernements personnels et despotiques ;
« Le Congrès de l´Association internationale des travailleurs réuni à Bruxelles déclare protester avec la plus grande énergie contre la guerre.
« Il invite toutes les sections de l´Association, dans leurs pays respectifs, ainsi que toutes les sociétés ouvrières et tous les groupes d´ouvriers quels qu´ils soient, à agir avec la plus grande ardeur pour empêcher une guerre de peuple à peuple, qui aujourd´hui, ne pourrait être considérée que comme une guerre civile parce que, mettant aux prises des producteurs, elle ne serait qu´une lutte entre frères et citoyens.
« Le Congrès recommande surtout aux travailleurs de cesser tout travail dans le cas où une guerre viendrait à éclater dans leurs pays respectifs. » (4)

Je passe sur les nombreuses autres résolutions de la Première Internationale et j´en viens aux congrès de la Deuxième Internationale. Le Congrès de Zurich, en 1893, déclare :

« La position des ouvriers vis-à-vis de la guerre est nettement fixée par la résolution du Congrès de Bruxelles sur le militarisme. La social-démocratie révolutionnaire doit s´opposer dans tous les pays, en mettant en jeu toutes les forces dont elle dispose, aux appétits chauvins de la classe dominante. Elle doit resserrer toujours davantage les liens de solidarité qui unissent les ouvriers de tous les pays et travailler sans cesse à l´élimination du capitalisme qui divise l´humanité en deux camps ennemis et dresse les peuples les uns contre les autres. La guerre disparaîtra avec l´abolition de la domination de classe. Le renversement du capitalisme, c´est la paix mondiale. »

Le Congrès de Londres en 1896 déclare :

« Seule la classe prolétarienne a sérieusement la volonté et le pouvoir de réaliser la paix dans le monde ; elle réclame :
1º La suppression simultanée des armées permanentes et l´organisation de la nation armée ;
2º L´institution de tribunaux d´arbitrage chargés de régler pacifiquement les conflits entre nations ;
3º Que la décision définitive sur la question de guerre ou de paix soit laissée directement au peuple pour le cas où les gouvernements n´accepteraient pas la sentence arbitrale. »

Le Congrès de Paris en 1900 recommande comme moyen pratique de lutter contre le militarisme :

«Que les partis socialistes s´emploient partout à éduquer et à organiser la jeunesse en vue de la lutte contre le militarisme et qu´ils accomplissent cette tâche avec la plus grande énergie.»

Permettez-moi encore de vous citer un passage important de la résolution du Congrès de Stuttgart de 1907 où sont résumés très concrètement toute une série de moyens pratiques dont dispose la social-démocratie dans sa lutte contre la guerre. On y lit :

« En fait, depuis le Congrès international de Bruxelles, le prolétariat, tout en poursuivant sa lutte incessante contre le militarisme par le refus des dépenses militaires et navales, par l´effort de démocratisation de l´armée, a recouru avec une vigueur et une efficacité croissante aux moyens les plus variés pour prévenir les guerres ou pour y mettre un terme, ou pour faire servir à l´affranchissement de la classe ouvrière l´ébranlement communiqué par la guerre à toutes les couches sociales : ainsi notamment l´entente des trade-unions anglaises et des syndicats ouvriers français après la crise de Fachoda pour assurer la paix et rétablir les bons rapports entre la France et l´Angleterre ; l´action des partis socialistes au Parlement français et au Parlement allemand dans la crise du Maroc ; les manifestations populaires organisées à cet effet par les socialistes de France et d´Allemagne ; l´action concertée des socialistes autrichiens et des socialistes italiens réunis à Trieste pour prévenir un conflit entre les deux États ; l´intervention vigoureuse de la classe ouvrière de Suède pour empêcher une attaque contre la Norvège ; enfin, les héroïques sacrifices et combats de masse des socialistes, des ouvriers et des paysans de Russie et de Pologne pour empêcher la guerre déchaînée par le tsarisme, pour y mettre un terme et pour faire jaillir de la crise la liberté des peuples de Russie et du prolétariat. (5)
«Tous ces efforts donc attestent la puissance croissante de la classe ouvrière et son souci de maintenir la paix par d´énergiques interventions.» (6)

Et maintenant, je vous pose une question : trouvez-vous, Messieurs, dans toutes ces résolutions la moindre invitation à nous placer devant les soldats et à leur crier : ne tirez pas ! Et pourquoi ne l´y trouvez-vous pas ? Serait-ce parce que nous craignons les conséquences de pareille agitation, que nous avons peur d´un paragraphe du code pénal ? Ah, nous serions de bien tristes sires si la peur des conséquences nous retenait de faire ce que nous avons reconnu nécessaire et salutaire. Non, si nous ne le faisons pas c´est que nous nous disons : ceux qui portent, comme on dit, la livrée du roi, sont une partie du peuple travailleur et s´ils comprennent que les guerres sont un phénomène condamnable et contraire aux intérêts du peuple, alors les soldats, sans que nous les y invitions, saurons bien d´eux-mêmes ce qu´ils ont à faire le cas échéant.

Vous le voyez, Messieurs, l´agitation que nous menons contre le militarisme n´est pas aussi pauvre et aussi simpliste que se l´imagine le procureur. Nous avons tant de moyens d´action et si divers : éducation de la jeunesse, et nous la pratiquons avec zèle et avec un succès durable en dépit de tous les obstacles que l´on dresse sur notre chemin ; propagande en faveur du système de la milice ; rassemblements de masse ; manifestations de rue... Et enfin jetez un coup d´oeil en Italie. Comment les ouvriers conscients y ont-ils réagi à l´aventure de la guerre en Tripolitaine (7) ? Par une grève de masse qui fut conduite de la façon la plus brillante. Et comment a réagi à cet évènement la social-démocratie allemande ?

Le 12 novembre, la classe ouvrière berlinoise, dans douze meetings, a adopté une résolution dans laquelle elle remerciait les camarades italiens pour leur grève de masse.

Nous y voilà, la grève de masse, s´écrie le procureur ! Il croit voir là mon dessein le plus subversif, celui qui est de nature à ébranler le plus l´État. Ce matin, le procureur a étayé tout particulièrement son accusation en faisant référence à mon agitation en faveur de la grève de masse ; il reliait cette campagne à des perspectives fort effrayantes de révolution violente telles qu´elles ne sauraient exister que dans l´imagination d´un procureur prussien. Monsieur le Procureur, si je pouvais supposer qu´existe chez vous la moindre capacité de suivre le mode de raisonnement de la social-démocratie et de comprendre une conception historique plus noble, je vous expliquerais ce que j´expose non sans succès dans chacune de mes réunions, à savoir que les grèves de masse constituent une période déterminée de l´évolution de la situation actuelle, et qu´à ce titre, elles ne sauraient être « fabriquées », pas plus qu´on ne « fabrique » une révolution. Les grèves de masse sont une étape de la lutte de classes à laquelle, il est vrai, l´évolution actuelle conduit avec la nécessité d´un phénomène naturel. Tout notre rôle, c´est-à-dire le rôle de la social-démocratie, consiste à faire prendre conscience à la classe ouvrière de cette tendance de l´évolution, afin que les ouvriers constituent une masse populaire éduquée, disciplinée, résolue et agissante et soient ainsi à la hauteur de leur tâche.

Vous le voyez, en évoquant dans l´acte d´accusation le spectre de la grève de masse tel qu´il le conçoit, le procureur veut, une fois de plus, me condamner pour ses idées à lui et non pour les miennes.

Je vais conclure. Je voudrais faire une dernière remarque.

Dans son exposé, M. le Procureur, a consacré une attention toute particulière à ma modeste personne. Il m´a décrite comme constituant un grand péril pour la sécurité de l´État, il n´a même pas hésité à s´abaisser au niveau d´une feuille de bas étage, le Kladderadatsch (8), en m´appelant « Rosa la Rouge ». Qui plus est, il a même osé mettre en cause mon honneur personnel, en insinuant que je risquais de m´enfuir dans le cas où le tribunal donnerait suite à sa demande de peine.
Monsieur le Pocureur, je dédaigne de répondre aux attaques dirigées contre ma personne mais je tiens à vous dire une chose : vous ne connaissez pas la social-démocratie !

(Interruption du président : « Nous ne sommes pas ici pour écouter un discours »).

Dans la seule année 1913, beaucoup de vos collègues ont travaillé à la sueur de leur front à faire condamner notre presse à soixante mois de prison au total.

Auriez-vous par hasard entendu dire qu´un seul de ces pauvres pécheurs ait pris la fuite pour échapper à une condamnation ? Croyez-vous que cette pluie de condamnations ait fait vaciller un seul social-démocrate dans l´accomplissement de son devoir ou l´ait ébranlé ? Ah, non Messieurs, notre oeuvre se moque bien du réseau dense de tous vos paragraphes juridiques, elle grandit et prospère en dépit de tous les procureurs du monde.

Un mot pour finir sur l´attaque inqualifiable qui retombe sur celui qui l´a lancée.

Le procureur a dit littéralement, je l´ai noté, qu´il demandait mon arrestation immédiate, car il était inconcevable que la prévenue ne prît pas la fuite. C´est dire en d´autres termes : si moi, procureur, j´avais à purger un an de prison, je prendrais la fuite. Monsieur le Procureur, je veux bien vous croire, vous, vous fuiriez. Un social-démocrate, lui, ne s´enfuit pas. Il répond de ses actes et se rit de vos condamnations.
Et maintenant condamnez-moi !

Notes
1) Paul Levi et Kurt Rosenfeld (1877-1943). Rosenfeld, avocat puis membre de l´USPD pendant la guerre. Emigré à Paris, il participa avec Romain Rolland au contre-procès organisé à Londres sur la question de l´incendie du Reichstag. Aux USA, il s´efforça d´amener les Américains d´origine allemande à combattre les puissances de l´Axe.
2) Rosa reprend la phrase d´un discours de Guillaume II à ses troupes à la veille de l´expédition militaire contre la Chine (1900).
3) En allemand, Kadavergehorsam - mot à mot : obéissance de cadavre.
4) J. Freymond, La Première Internationale, t. 1, pp. 403-404.
5) ] Allusion à la guerre russo-japonaise et à la Révolution russe de 1905.
6) VIIe Congrès socialiste international. Compte rendu analytique, Bruxelles, 1908, pp. 422-423. Le congrès rappelle les principales crises qui ont mis en danger la paix en Europe entre Fachoda (1898) et la première affaire du Maroc réglée au Congrès d´Algésiras (1906).
7) Guerre dans laquelle l´Italie envahit et occupa la Tripolitaine - ancienne province du nord-ouest de la Libye cédée par les Ottomans en 1912.
8) Hebdomadaire satirique qui a paru à Berlin de 1848 à 1944.

 
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30 novembre 2007 5 30 /11 /novembre /2007 19:56
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La marche lente et inexorable vers la guerre a été ponctuée dès les années 1890 par des conflitsde tous ordres. Rosa Luxemburg les a suivis, accompagnés par des articles, des meetings, destinés à faire prendre conscience de la dimension capitaliste, du développement impérialiste de chacun d'entre eux. Comme l'indique celui-ci sur l'affrontement colonialiste à propos de la domination sur le Maroc:


Une nuée chargée d’orage impérialiste s’est levée dans le monde capitaliste.

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Une nuée chargée d’orage impérialiste s’est levée dans le monde capitaliste. Quatre grandes puissances d’Europe - la France, l’Allemagne, l’Angleterre et l’Espagne - sont directement impliquées dans un trafic qui a pour enjeu le destin du Maroc et par la même occasion, celui de plusieurs vestes territoires du “continent noir” considérés ici et là comme des “compensations”. Chaque jour une dépêche annonce l’état des négociations et avec elle les espoirs et les craintes montent de manière brusque et désordonnée. Jaillira-t-il de cette nouvelle nuée orageuse l’éclair d’une guerre meurtrière ou bien l’orage menaçant va-t-il se dissiper et prendre l’aspect d’une tractation “pacifique” faisant passer quelques lambeaux de l’univers d’une poigné de fer du militarisme européen à une autre? C’est à l’heure actuelle la question qui préoccupe des milliers d’êtres humains. Et, pour trouver une réponse à cette question tous les regards, pleins d’inquiétude, se dirigent vers la porte close d’une pièce où deux hommes d’Etat confèrent ensemble : l’ambassadeur français Cambon et le secrétaire d’Etat allemand Kilderlen-Wacher. Cependant il n’est un secret pour personne que les deux hommes d’Etat n’ont aucun pouvoir propre et ne sont que de pauvres pantins en carton mis en mouvement par une ficelle dont le bout est entre les mains d’une clique de quelques grands capitalistes. Guerre et paix, le Maroc en échange du Congo ou le Togo pour Tahiti, ce sont là des questions où il y va de la vie de milliers de personnes, du bonheur ou du malheur de peuples entiers. Une douzaine de chevaliers de l’industrie racistes laissent de fins commis politiciens réfléchir et marchander sur ces questions comme on le fait au marché pour la viande ou les oignons, et les peuples attendent la décision avec angoisse tel des troupeaux de moutons conduits l’abattoir. C’est là une image d’une brutalité si révoltante et d’une bassesse si grossière qu’elle devrait remplir de rage tous ceux qui ne sont pas directement intéressés par ce trafic sordide. Cependant l’indignation morale n’est pas la règle et l’arme avec lesquelles on pourrait avoir prise sur les péripéties de la politique capitaliste mondiale.

 

Pour le prolétariat conscient il s’agit avant tout de saisir l’affaire marocaine dans sa signification symptomatique, faire l’estimation de ses larges connexions et de ses conséquences. Mais on peut déjà dire que l’aventure politique mondiale récente est riche d’enseignements pour la conscience politique du prolétariat.

 

La crise marocaine est avant tout une satire impitoyable de la farce du désarmement des Etats capitalistes et leurs bourgeoisies. En Angleterre et en France, hommes d’Etat et parlementaires exprimaient en de belles phrases la nécessité de réduire les dépenses concernant les instruments de meurtre et de substituer à la guerre barbare les rapports civilisés de la procédure arbitrale. En Allemagne le chœur libéral s’est joint avec enthousiasme aux sons de cette musique de paix. Aujourd’hui, les mêmes hommes d’Etat et les mêmes parlementaires s’échauffent pour une aventure politique coloniale menant les peuples au bord du précipice d’une guerre mondiale. Le chœur libéral en Allemagne, lui aussi, s’est enthousiasmé pour cette aventure grosse d’une guerre comme jadis pour les déclamations de paix. Ce soudain changement de scène montre une nouvelle fois que les propositions de désarmement et les démonstrations de paix du monde capitaliste ne sont rien et ne peuvent être rien d’autre qu’un décor qui de temps en temps est bon pour la comédie, politique, mais qui est cyniquement écarté quand les affaires deviennent sérieuses. Espérer quoique ce soit d’une quelconque tendance de paix de la société capitaliste et mise sur elle, serait pour le prolétariat la plus folle des illusions.

 

En outre, dans la question marocaine s’exprime de nouveau clairement la relation intime entre la politique mondiale et la situation marocaine, où il suffit d’un rien pour précipiter l’Allemagne dans une guerre sanglante, changera fortement en tout cas la situation générale actuelle ainsi que celle que les possessions coloniales de l’Allemagne. Elle a surgi exactement comme pour la campagne chinoise et plus tard l’affaire algérienne, au moment des vacances parlementaires. La représentation suprême élue du peuple allemand, le Reichstag, est totalement exclu des décisions et des évènements les plus importants et les plus lourds de conséquences. Seul un régime personnel avec ses hommes de peine - lui-même instrument irresponsable entre les mains d’une clique irresponsable - agit selon son bon plaisir avec le destin de 64 millions d’allemands comme si l’Allemagne était un Etat despotique oriental. Les discours impériaux de Königsberg et de Marienburg sont devenus clairs : l’instrument du ciel joue dans la plénitude de sa souveraineté, ou plutôt il est joué au dos du peuple, par quelques cliques capitalistes avides de rapine. Le monarchisme et ses béquilles, les junkers conservateurs bellicistes, sont les principaux coupables dans l’aventure marocaine.

 

Non moindre est la force agissante de la puissance navale et militaire qui perce à travers la diplomatie allemande dans l’affaire marocaine, puissance insensée et qui n’est rien d’autre que cette pression brutale des tas de canons et de bateaux cuirassés amoncelés au fil des décennies, qui soi-disant servaient de remparts indispensables de la paix, et maintenant rendent les responsables de la politique allemande actuelle si audacieux et si belliqueux. Ce “saut de panthère” de la politique étrangère qui, dans ses développements futurs sera peut-être pour le peuple allemand chargé de toutes sortes de conséquences fatales, nous le devons avant tout à ces partis bourgeois qui ont chargé et soutenu l’armement incessant de l’impérialisme allemand. En tête marche avec cette tâche de sang sur le front l’hypocrite parti du centre qui, en 1900, s’est servi du mémorable redoublement des effectifs de la flotte allemande de combat pour se hisser au rang de parti gouvernemental. Non moindre est la responsabilité incombant au libéralisme piteux, dont seul l’exemple de la montée du militarisme peut mesurer la chute progressive depuis un quart de siècle. L’échec total est l’ultime fin misérable du libéralisme bourgeois, eu égard à la puissance percé en avant du militarisme foulant aux pieds et écrasant démocratie, parlementarisme et réforme sociale.

 

Cependant, c’est justement parce que le cours le plus récent de la politique mondiale avec son aventure actuelle n’est que l’émanation logique du développement économique et politique de la société bourgeoise de classe qu’il a un côté révolutionnaire faisant son chemin au-delà de la misère immédiate et caractère momentanément arrogant de ce cours. La signification historique du conflit marocain ramenée à son expression la plus simple et la plus crue, c’est la lutte concurrentielle entre les représentants du capitalisme européen pour l’appropriation de la pointe nord-ouest du continent africain et son engloutissement par le capital.

 

C’est ce qu’exprime chaque séquence de l’évolution de la politique mondiale. Mais la “Némésis” du capitalisme veut que plus ce dernier dévore le monde et plus il sape lui-même ses propres racines. Au même moment où il se prépare à introduire “l’ordre” capitaliste dans les rapports primitifs des tribus de pasteurs et des villages de pécheurs marocains isolés du monde, s’écroule déjà l’ordre crée par lui à tous les coins et confins des autres continents. Ces flammes de la Révolution brûlent en Turquie, en Perse, à Mexico, à Haïti, elles lèchent calmement les édifices de l’Etat au Portugal, en Espagne, en Russie. Partout l’anarchie, partout les intérêts des peuples et les forces du progrès et du développement se rebellent contre le gâchis de l’ordre bourgeois. Et c’est ainsi que la campagne récente du Capital pour de nouvelles conquêtes n’est que le chemin qui le mène vers sa propre tombe. L’aventure marocaine ne sera finalement, comme chaque épisode de la politique mondiale qu’un pas vers l’accélération de l’effondrement capitaliste.

 

Dans ce procès, le prolétariat, avec sa conscience de classe, n’est pas appelé à regarder passivement l’écroulement de l’ordre de la société bourgeoise. La maîtrise consciente de la signification cachée de la politique internationale et ses conséquences n’est pas pour la classe des travailleurs une philosophie abstraite, mais bien au contraire, le fondement intellectuel d’une politique dynamique. L’indignation morale n’est certes pas en soi une arme contre l’économie criminelle du capitalisme, mais elle est, comme dit Engels, un véritable symptôme réel reflètent la contradiction entre la société régnante, les sentiments de justice et les intérêts des masses du peuple. La tache et le devoir de la social-démocratie consistent maintenant à exprimer avec autant de clarté que possible cette contradiction. Non seulement l’avant-garde organisée du prolétariat mais les couches les plus larges du peuple travailleur doivent se soulever dans un torrent de protestations contre le nouveau raid de la politique internationale capitaliste. Le seul moyen efficace pour lutter contre le crime de la guerre et de la politique coloniale, c’est la maturité intellectuelle et la volonté résolue de la classe des travailleurs qui, par une rébellion impliquant tous les exploités et les dominés changera la guerre mondiale infâme, conçue dans les intérêts du capital, en une paix mondiale et en une fraternisation socialiste des peuples.

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6 novembre 2007 2 06 /11 /novembre /2007 16:23
Pour consulter le blog: linter.over-blog.com

actualit---de-la-r--sistance-anti-imp--rialiste-001.jpgCela a été écrit quand? en 1978. Eternelle présence, éternels mensonges pour masquer les intérêts économiques et militaires.

Actualité de la résistance anti-impérialiste, 5 mai 1978

Comme pour les troupes françaises au Sahara occidental, comme pour les Casques bleus au Liban, comme au Zaïre, le gouvernement français a essayé de masquer l'intervention militaire au Tchad sous une quantité de mensonges à propos de la prétendue "coopération militaire" entre instructeurs français et troupes du Tchad. Les deux soldats français tués au Tchad prouvent bien que en plus des "assistants techniques", il existe aussi des troupes opérationnelles envoyées par le gouvernement français en aide aux troupes tchadiennes contre le FROLINAT. Actuellement, en plus des troupes françaises qui comptent au moins 1 500 soldats, dix Jaguars sont arrivés à N'Djamena.
Alors que le FROLINAT essuie de dures pertes, en France, on pleure sur le sort des malheureux Français qui ont dû rentrer ... Quel malheur pour la presse que Christian Masse n'ait pas été fouetté comme certains prisonniers  du Polisario ont eu le malheur de le raconter ... Ils auraient bien aimé pouvoir parler d'autres choses à leur conférence de presse ...
Le transit des avions français s'est fait par Dakar, où Yvon Bourges (ministre dela défense) se rendra bientôt. En tout, il y aura une vingtaine d'avions français sous les ordres des autorités tchadiennes.
Le 20 février, la ville de Faya-Largeau avait été reprise par le FROLINAT après une cuisante défaite des troupes du général Malloum. Les conditions posées par les représentants du FROLINAT lors des négociations avec le Conseil supérieur militaire (qui ont eu lieu du 23 au 27 mars à deux endroits de Lybie) n'ont pas été respectées par le gouvernement tchadien, bien conseillé par la France. L'assistance financière française est aussi primordiale pour l'armement tchadien dont se sert une armée en déroute: en 76, 80 millions de francs pour le matériel de guerre. En 77, 160 millions.
Il est intéressant de rappeler qu'aux termes des accords de coopération technique établis lors d'un voyage de Chrirac, au Tchad en mai 76, il était prévu un droit de survol et d'escale pour les avions militaires militaires français se dirigeant vers Djibouti et l'Océan Indien. Lors de ces accords, il était aussi convenu qu'un comité militaire constitué par la Lybie et le Niger devait "se rendre compte de la présence ou non de troupes ou de bases militaires étrangères au Tchad. "La coopération française" comportant l'apport de légionnaires, paracommandos, pilotes, mercenaires, avions d'appui au sol, bombardiers, ... ne rentre-t-elle pas dans cette catégorie?
Après douze ans de combat, quelle que soit la taille de l'ennemi à affronter, le FROLINAT n'a pas l'intention d'abandonner les succès obtenus. Le FROLINAT a déclaré entendre déjouer le piège des propositions de cessez-le-feu dont les ennemis ne respectent pas les conditions. A Habéché, Bongor, Noussoro, Lère et Pala, des manifestations massives ont lieu en protestation contre la présence militaire française. La résistance du FROLINAT aux multiples formes de l'agression perpétrée par la junte tchadienne et son aide-conseil française près de Salal et Guéréda montre que le combat est loin d'être abandonné et que les combattants du FROLINAT sont peu disposés à poser les armes.

TROUPES FRANCAISES HORS DU TCHAD!
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Militants d'AD

Situation des  MILITANTS

Nathalie Ménigon

Georges Cipriani

en libération conditionnelle

Jean-Marc Rouillan

en semi-liberté 

NOS COMBATS

(avril 2010)

Après la semI-liberté de Georges Cipriani, la campagne continue pour la libération de Jean-Marc Rouillan
et encore et toujours  
Pour une solidarité avec ces militants en semi-liberté, en libération conditionnelle et au-delà car le but reste le même: leur permettre de préserver leur identité politiqe et de vivre matériellement, politiquement.

(septembre 2008)

Contre le risque de peine infinie pour les prisonniers révolutionnaires - contre la rétention de sûreté - contre le CNO
Pour une libération complète et sans condition des prisonniers révolutionnaires
Pour une solidarité avec ces militants en semi-liberté, en libération conditionnelle et au-delà car le but reste le même: leur permettre de préserver leur identité politiqe et de vivre matériellement, politiquement.

  (août 2009)


Le combat pour la libération des prisonniers d'Action directe doit donc continuer et se renforcer ...
Après la réincarcération de Jean-Marc Rouillan, nous avons appris ce 20 août, le refus brutal et tellement politique de la libération conditionnelle pour Georges Cipriani.

Alerte: La santé, la vie de Jean-Marc Rouillan sont menacées, il doit être libéré.
Liberté pour Georges Cipriani'

C. GAUGER ET S. SUDER

PROCES CONTRE C. GAUGER ET S. SUDER

Pour suivre le procès : lire

 

LIBERATION DE SONJA SUDER

EMPRISONNEE DEPUIS SEPTEMBRE 2011 POUR DES FAITS REMONTANT A PLUS DE TRENTE ANS ET SUR LES SEULES ACCUSATIONS D'UN TEMOIN REPENTI HANS-JOACHIM KLEIN.

 

ARRET DES POUSUITES CONTRE CHRISTIAN GAUGER ET SONJA SUDER

ENGAGEES AU MEPRIS DE TOUTE PRESCRIPTION

SUR LES SEULES BASES DE DECLARATIONS OBTENUES SOUS LA TORTURE D'UNE PART ET D'UN REPENTI D'AUTRE PART

 

NON A LA TORTURE - NON A LA CITATION COMME TEMOIN D'HERMANN F.

Militant grièvement blessé en 1978, interrogé dès le lendemain d'une opération où il a perdu ses deux yeux et a été amputé des deux jambes, séquestré durant quatre mois sans mandat d'arrêt par la police, maintenu à l'iolement, et dont le tribunal prétend aujourd'hui utiliser les déclarations, qu'il a remis en cause dès qu'il a qu'il a pu être libéré des griffes des policiers.

 

LIBERATION DE SIBYLLE S., ARRETEE LE 9 AVRIL EN PLEIN PROCES POUR REFUS DE TEMOIGNER :

 

condamnée il y a plus de trente ans sur la base des déclarations de son ex-compagnon Hermann F., elle est restée proche de lui toutes ses années et refuse qu'on utilise ces déclarations qui lui ont été extorquées au prix de traitements inhumains.

 


Liberté pour Sibylle et Sonja 2